Ecrivains
Publié le 27/06/2007 à 12:00 par feobus
Derek Alton Walcott est un poète, écrivain et artiste saint-lucien né le 23 janvier 1930 à Castries.
Il est principalement connu pour son poème épique Omeros, une adaptation de l'Iliade aux Caraïbes.
Il a reçu le Prix Nobel de littérature en 1992.
Publié le 27/06/2007 à 12:00 par feobus
Gaspard-Hubert Lonsi Koko est un homme politique socialiste français d'origine congolaise (RDC), candidat non élu aux élections régionales de 2004 à Paris.
Né à Léopoldville (actuellement Kinshasa) le 3 mars 1961 et installé à Paris depuis 1983, Gaspard-Hubert Lonsi Koko adhère au Parti socialiste en 1995 et devient en 2000 secrétaire de section, il est également membre du bureau de la Fédération parisienne du PS.
Certains médias ont évoqué son nom parmi d'autres fin 2003 et début 2004 à propos des candidatures de Français d'origine non européenne aux élections régionales. Son club de réflexion, Enjeux Socialistes et Républicains, qui "a pour objet de permettre aux sympathisants et adhérents du Parti Socialiste, issus de l'immigration non-européenne et des DOM-TOM, de participer à la vie socio-politique en France et d'apporter des analyses sur une mondialisation juste et humaine".
Drosera capensis, Les Éditions de l'Égrégore, juin 2006, ISBN 2-916335-01-3
Le demandeur d'asile, Les Éditions de l'Égrégore, janvier 2006, ISBN 2-916335-00-5
Un nouvel élan socialiste, L'Harmattan, mai 2005,
"Il ne faut pas que les opprimés d'hier se transforment en oppresseurs d'aujourd'hui, ni que les exclus d'aujourd'hui deviennent de potentiels bourreaux de demain."
"Vouloir systématiquement noircir un Noir, c'est manquer d'imagination."
"La résistance à l'humiliation est l'un des droits du citoyen."
"Culpabiliser sans cesse les victimes, ce n'est pas la manière la plus intelligente de consolider la cohésion nationale indispensable à la France du troisième millénaire."
"Si les bulletins de vote se trouvaient sur les cimes des arbres, certains politiques épouseraient des primates."
"Tout précurseur sait que le bon usage de l'intelligence et de l'instinct permet de mieux interpréter les signes du temps."
"Celles les personnes au tempérament prométhéen parviennent à briser les chaînes d'asservissement aux traditions."
"En France, l'inconscient néocolonial est tellement bien ancré dans les esprits qu'il est inconcevable qu'un Français-Africain soit spécialiste de l'Afrique."
Publié le 26/06/2007 à 12:00 par feobus
Daniel Boukman est né le 15 avril 1936 à Fort-de-France (Martinique). Son pseudonyme est emprunté au nom du prêtre vaudou, organisateur le 14 août 1791 de la cérémonie du Bois Caïman qui marque de début de l’insurrection définitive à Saint-Domingue, menant à l’indépendance d’Haïti.
En 1954, Daniel Boukman quitte la Martinique pour Paris où il fait des études de lettres classiques à la Sorbonne et milite au sein de l’Association des Étudiants Martiniquais. En octobre 1961, en refusant de revêtir l’uniforme militaire français, il entre en insoumission lors de la guerre coloniale menée par la France en Algérie. Par le canal d’une organisation issue du Front Antillo-Guyanais pour l’Autonomie, interdite en 1961 par le gouvernement français du moment, il rejoint alors (au Maroc) le Front de Libération National Algérien. En juillet 1962, il regagne l’Algérie indépendante où, de 1966 à 1981, sous l’égide du ministère de l’Éducation Nationale algérien, il enseigne le français au lycée Ibn Tourmet de Boufarik.
C’est dans cette période que Boukman écrit ses premières pièces (en français) qui traitent de thèmes politiques : la situation coloniale de son pays, l’émigration forcée de ses compatriotes en France, les limites de la Négritude, le néocolonialisme, la place de la femme algérienne pendant la guerre de libération et après l’indépendance, la solidarité avec la lutte du peuple palestinien.
Amnistié en 1975, il effectue des voyages dans son île natale, mais reste en Algérie jusqu’en 1981, date à laquelle il retourne à Paris où, entre autres, il fait partie de l’équipe de Radio Mango (radio nationaliste) jusqu’à sa suppression en 1987. Pendant la même période, il milite au sein d’une association martiniquaise (Espace Caribéen Mango) dont la défense et l’illustration de la langue créole était l’un des axes majeurs de son activité. Il est assistant parlementaire en France de 1986 à 1990. Également journaliste, il écrit de nombreux articles dans diverses revues.
En 1999, il regagne la Martinique où, durant deux années, il enseigne la langue et culture créoles à l’Université des Antilles et de la Guyane, à Schœlcher, en tant que « maître de conférences associé ». Depuis, il réalise à Radio Martinique une émission consacrée à la langue créole, et participe à des ateliers d’études du créole ouverts aux créolophones d’origine, d’adoption ou d’option.
C’est alors qu’après sa production poétique (uniquement) en créole, renouant avec le théâtre il passe, selon sa propre expression, « du duel au duo » en écrivant des pièces bilingues où alternent le créole et le français et par lesquelles il dénonce les tares de la petite-bourgeoisie martiniquaise aliénée, les effets ravageurs de la société d’hyper-consommation dont la télévision, tueuse d’imaginaire, est l’un des instruments premiers.
Publié le 26/06/2007 à 12:00 par feobus
Le professeur Ama Mazama, originaire de la Guadeloupe, est l'une de rares femmes distinguée pour son parcours universitaire ; elle exerce dans les hauts milieux académiques et milite pour la cause noire. À Temple University, Philadelphia (USA), comme le rapporte l'article de Daryl Gale Alighter - Shade of owl (7-14 décembre 2000), elle eut pour collègues les professeurs Théophile Obenga et Molefi Kete Asante. Son acharnement pour la cause noire, elle l'a symbolisé par le rejet de son nom issu de l'esclavage, Marie-Josée Cérol, pour prendre un nom négro-africain : Ama Mazama. Ce n'est donc pas le fruit d'un hasard si les africanistes dans leur ouvrage collectif Afrocentrismes (Histoire des Africains entre Égypte et Amérique), Khartala, Paris, 2000, ont consacré une étude virulente et raciste à Ama Mazama, sous la plume de Stella Vincenot, intitulée : Peut-on être afrocentriste en Guadeloupe ?
L'action rationnelle de cette femme choque profondément certains ennemis de l'unité des peuples noirs dans le monde.
Ama Mazama a obtenu une licence en linguistique à l'université de Bordeaux III en 1981, une maîtrise en linguistique avec la haute distinction dans la même université en 1982 ; Un doctorat en linguistique avec haute distinction à l'université de la Sorbonne en 1987. Sujet de son doctorat : Le créole guadeloupéen.
Le professeur Ama Mazama critique sévèrement la créolité, discours mystifiant les valeurs africaines, tout en dénonçant aussi le caractère nègrephobe et extraverti de cette pensée. La thèse révisionniste de Raphaël Confiant, qui semble estimer que l'homme noir est inférieur, corrobore avec certaines idées des intellectuels occidentaux (Gobineau, etc.).
Par sa pensée Ama Mazama appartient à la fine fleur de l'élite intellectuelle noire qui aborde efficacement les réalités historiques des peuples noirs dans le monde.
Publié le 25/06/2007 à 12:00 par feobus
Angola
José Eduardo Agualusa (1960– )
Mário Pinto de Andrade (1928–1990)
Arlindo Barbeitos (1940– )
Mendes de Carvalho
Dia Kassembe
Alda Lara (1930–1962)
Pedro de Gouveia Leite Mateus
Mbwango (Reis Luis)
Agostinho Neto (1922–1979)
Pepetela (Artur Carlos Maurício Pestana dos Santos, 1941– )
Oscar Ribas
Paula Tavares (1952– )
Amplia Veiga, born in Portugal (1931– )
José Luandino Vieira (1935– )
Manuel Rui Monteiro
Ondjaki
Benin
Christine Adjahi Gnimagnon
Berte-Evelyne Agbo
Colette Senami Agossou Houeto (1939– )
Francis Aupiais
Olympe Bhêly-Quenum
Florent Couao-Zotti (1964– )
Félix Couchoro
Richard Dogbeh
Adelaide Fassinou (1955– )
Gisèle Hountondji (1954– )
Paulin J. Hountondji (1942– )
Béatrice Lalinon Gbado
Paulin Joachim (1931– )
Lauryn
Hortense Mayaba
Jean Pliya ((1931– )
José Pliva (1966– )
Botswana
Galesiti Baruti
Caitlin Davies
Unity Dow
Bessie Head
Moteane Melamu
Barolong Seboni
Andrew Sesinyi
Mositi Torontle
Burkina Faso
Angèle Bassolé-Ouédraogo
Sarah Bouyain (1968– )
Simporé Simone Compaore
Zarra Guiro (1957– )
Monique Ilboudo
Sophie Heidi Kam (1968– )
Sandra Pierrette Kanzie
Marie-Simone Séri
Joseph Ki-Zerbo
Gaël Koné (1976– )
Honorine Mare (1972– )
Suzy Henique Nikiéma (1983– )
Adiza Sanoussi
Burundi
Barbara Kururu Ndimurukundo (1950– )
Esther Kamatari (1951– )
Colette Samoya Kiruya (1952– )
David Niyonzima (1959– )
Donatien Bihute (1940– )
Antoine Kaburahe (1965– )
Cameroun
Therese Assiga Ahanda
Mongo Beti
Calixthe Beyala
Jacques Bonjawo
Gaston Kelman
Ferdinand Oyono (1929– )
Evelyne Mpoudi Ngole (1953-)
Professor Ndumbe Eyoh
Francis Bebey
Werewere Liking
Yémy
joseph ngoue Luc SINDJOUN Achille MBEMBE
Cap-Vert
Germano Almeida (1945– )
Jorge Barbosa
Leopoldina Barreto
Amílcar Cabral (1921–1973)
Alile Wahnon Ferro (1940– )
Sergio Frusoni (1901–1975)
Baltasar da Silva Lopes (1907–1989)
Antonio Lima
Manuel Lopes
João Cleófas Martins (1901-1970)
Yolanda Morazzo (1928– )
Manuel de Novas (1938– )
Ivone Ramos: (1926– )
Dina Salústio (1941– )
Ana Julia Monteiro Sança (1949– )
Rosa de Saron
Eugénio Tavares (1867–1930)
République centrafricaine
Andrée Blouin (1921– )
Congo-Brazzaville
Jeannette Balou Tchichelle (1947– )
Noëlle Bizi Bazouma (1959– )
Silvie Bokoko (1960– )
Adèle Caby-Livannah (1957– )
Cucile-Ivelyse Diamoneka (1940– )
Diur N'Thumb
Emmanuel Dongala
Aleth Felix- Tchicaya (1955– )
Mambou Aimée Gnali
Floe Hazoume (1959– )
Francine Laurans (1962– )
Binéka Daniele Lissouba
Henri Lopes (1937– )
Alain Mabanckou
Betty (Elisabeth) Mweya Tol'Ande (1947– )
Ghislaine Sathoud (1969– )
Tchicaya U Tam'si (1931–1988)
Marie-Leontine Tsibinda
Brigitte Yengo
Sony Labou Tansi
Jean Malonga
Guy Menga
Congo-Kinshasa (RDC)
Léonie Abo, (1945– )
Amba Bongo
Lima-Baleka Bosekilolo
Maguy Kabamba (1960– )
Christine Kalonji
Justine M'Poyo Kassa-Vubu (1951– )
Kama Sywor Kamanda (1952– )
Sony Labou Tansi (1947–1995)
Bona Mangangu (1961-)
V.Y. Mudimbe (1941– )
Wivine N'Landu Kavidi
Clémentine Nzuji (1944– )
Kabika Tshilolo
Frederick Kambemba Yamusangie
Raïs Neza Boneza (1979– )
Frederick Kambemba Yamusangie
Lye M Yoka
Pius Ngandu Kashama (1946-)
José Tshisungu wa Tshisungu
Côte d'Ivoire
Josette D. Abondio
Jean-Marie Adiaffi (1951– )
Marie-Danielle Aka
Marie Giselle Aka
Alexis Allah
François-Joseph Amon d'Aby
Assamala Amoi
Michele Assamoua
Annick Assemian
Maurice Bandaman
Angèle Bassolé-Ouédraogo
Khadi Sy Bizet
Fatou Bolli
Tanella Boni
Isabelle Boni-Claverie
Marie Anne Caro
Jeanne de Cavally (1926– )
Fanny Fatou Cissé (1971– )
Micheline Coulibaly
Bernard Dadié
Germain Coffi Gadeau
Henriette Diabate
Muriel Diallo (1967– )
Marion Diby Zinnanti (1960– )
Gina Dick
Richard Dogbeh
Oklomin Kacou
Simone Kaya (1937– )
Fatou Kéita
Venance Konan
Amadou Koné
Boundou Koné
Akissi Kouadio
Adjoua Flore Kouame (1964– )
Isaie Biton Koulibaly
Ahmadou Kourouma (1927–2003)
Adrienne Koutouan
Genevieve Koutou Guhl
Koffi Kwahulé
Lauryn
Manïssa
Mary Lee Martin-Koné
Mariama Méité (1967– )
Isabelle Montplaisir
Rosalie Nana (1962– )
Goley Niantié Lou
Pascale Quao-Gaudens (1963– )
Cristiane Remino-Granel
Marinette Secco
Marie-Simone Séri
Haïdara Fatoumata Sirantou
Véronique Tadjo (1955– )
Werewere-Liking Gnepo
Caroline Angèle Yao
Regina Yaou (1955– )
Annie Yapobi
Djibouti
Mouna-Hodan Ahmed (1972– )
Waberi Abdourahman (1965– )
Égypte [modifier]
'Abd Al-Rahman Abnudi
Tatamkula Afrika
Gamal Al-Ghitani
Hayam Abbas Al-Homi
Leila Ahmed
Samir Amin
Nawâl El Saadâwi (1931– )
Naguib Mahfouz, (1911–2006
Alifa Rifaat
Ahdaf Soueif
Salama Moussa
Mustafa Sadek El-Rafey
Muhammad Aladdin
Tawfiq al-Hakim
Mustafa Lutfi al-Manfaluti
Taha Hussein
Nabil Luka Babawi
Érythrée
Reesom Haile
Éthiopie
Innānu Āggonāfir
Haddis Alemayehu
Michael Daniel Ambatchew (1967– )
Kidist Bayelegne
Āfawarq Gabra Iyasus
Tsegaye Gabre-Medhin (1936-2006– )
Ābbe Gubaññā
Ababa Haylemelekot
Blattengeta Heruy Welde Sellase
Moges Kebede
Mangistu Lammā
Tāddasa Lībān
Nega Mezlekia
Sahle Sellassie (1936– )
Girmācchaw Takla Hāwāryāt
Demese Tsege
Hama Tuma (1949– )
Mammo Wudneh
Birhānu Zarīhun
Gabon
Jean-Baptiste Abessolo (1932– )
Nadège Noële Ango Obiang (1973– )
Peggy Lucie Auleley
Bessora (1968– )
Chantal Magalie Mbazoo-Kassa (1967– )
Justine Mintsa (1967– )
Ndouna Depenaud (1937– )
Sylvie Ntsame (1964– )
Vincent de Paul Nyonda (1918–1995)
Laurent Owondo (1948– )
André Raponda-Walker (1871–1968)
Georges Rawiri (1932–2006)
Angèle Ntyugwetondo Rawiri (1954– )
Robert Zotoumbat (1944-)
Gambie
Lenrie Peters
Alhagi Kah
Ghana
Ama Ata Aidoo (1940– )
Anthony Appiah
Ayi Kwei Armah
Raphael Armattoe
Bediako Asare
Meshack Asare (1945– )
Kofi Awoonor (1935– )
William Boyd
Abena Busia (1953– )
Akosua Busia
J.E. Casely-Hayford
Quobna Ottobah Cugoano
Amma Darko
Michael Dei-Anang
Efua Dorkenoo
Kwame Nkrumah (1909–1972)
(John) Atukwei Okai (1941– )
Frank Kobina Parkes (1932–2005 )
Nii Ayikwei Parkes (1974– )
Carl Christian Reindorf
Efua Theodora Sutherland (1924–1996 )
Isaac Kwamena Sagoe
Phelelisani Moyo
Guinée-Conakry
Camara Laye (1928-1980)
Tierno Monénembo
Guinée équatoriale
Juan Tomás Ávila Laurel (1966–
Sirah Balde de Labe
Nadine Bari
Aïssatou Barry (1959– )
Kesso Barry (1948– )
Mariama Barry
Josiane Cointet
Koumanthio Zeinab Diallo (1956– )
Mariana Kesso Diallo
Donato Ndongo-Bidyogo (1950– )
María Nsué Angüe (1945– )
Williams Sassine
Marie Bernadette Tiendrébéogo (1958– )
Senyo Adjibolosoo
Guinée-Bissau
Amílcar Cabral (1921–1973)
Nadine Nyangoma
Kenya [modifier]
Abdellatif Abdalla
Sayyid Aidarusi
Chacha Nyaigotti-Chacha
Rocha Chimera
Muyaka bin Haji al-Ghassany
Jomo Kenyatta (1892?–1978)
Mwana Kupona binti Msham
Micere Mugo (1942– )
Rebeka Njau (1930– )
Asenath Bole Odaga
Margaret Ogola
Moraa Gitaa
Grace Ogot (1930– )
M.G. Vassanji (1950– )
Ngugi wa Mirii (1951– )
Ahmad Nassir
Ngugi wa Thiong'o
Meja Mwangi (1948– )
Mwangi Gicheru
Elspeth Huxley (1907–1997)
Karen Blixen aka Isak Dinesen (1885–1962)
Wahome Muthahi (–2003)
Binyavanga Wainaina
Parselelo Kantai
Yusuf Dawood
Francis Imbuga
Yvonne Adhiambo Owuor
Billy Kahora
Hillary Ngweno
Leonard Kibera
Koigi wa Wamwere
Lesotho
Moroesi Akhionbare (1945– )
Thomas Mofolo (1876–1948)
Mzamane Nhlapo
Mpho Matsepo Nthunya
Libéria
Edwin Barclay
Edward Wilmot Blyden (1832–1912)
Wilton G. S. Sankawulo
Libye
Sadiq Al-Naihoum
Farag Al-Fakhri
Ibrahiem El-kouni
Madagascar
Jean-Joseph Rabearivelo (1903–1937)
Charlotte Arisoa Rafenomanjato
Michèle Rakotoson
Malawi
Steven Chimombo
Stanley Onjezani Kenani
Ken Lipenga
Jack Mapanje
Jack McBrams
Paul Tiyambe Zeleza
Mali
Abdoulaye Ascofaré
Ibrahima Aya
Amadou Hampâté Bâ (1900-1991)
Adame Ba Konaré
Seydou Badian Kouyaté
Massa Makan Diabaté (1938–1988)
Aïda Mady Diallo
Alpha Mandé Diarra (1954– )
Oumou Diarra
Doumbi Fakoly (1944– )
Aïcha Fofana (1957–2003)
Aïssatou Guido (1941– )
Aoua Kéita (1912–1980)
Fatouma Keïta (1977– )
Moussa Konaté
Yambo Ouologuem (1940– )
Bernadette Sanou Dao (1952– )
Bamekan Soucko Bathily
Fanta-Taga Tembely (1946– )
Aminata Dramane Traoré (1942– )
Falaba Issa Traoré (1930–2003)
Ahamadou Maiga dit Prince (1974– )
Maroc
Voir Liste d'écrivains marocains
Mauritanie
Moussa Diagana
Moussa Ould Ebnou
Mohammed al-Shankiti
Abderrahmane Sissako
Maurice
Richard Sedley Assonne
Lilian Berthelot
Marcel Cabon (1912–1972)
Raymond Chasle
Malcolm de Chazal (1902–1981)
Carl de Souza (1949– )
Ananda Devi
Jean Fanchette
Colleen Lindsay
Hervé Masson
Edouard Maunick
Tanure Ojaide (1948– )
Barlen Pyamootoo
Vinod Rughoonundun
Umar Timol
Khal Torabully
Dev Virasawmy
Yusuf Kadel
Mozambique
Paulina Chiziane (1955– )
Mia Couto (1955– )
José Craveirinha (1922–2003)
Luís Bernardo Honwana (1942- )
Ungulani Ba Ka Khosa
Lina Magaia
Aília Momplé (1935– )
Amélia Muge (1952– )
Glória de Santana (1925– )
Noémia de Sousa (1926– )
Niger
Andrée Clair
Hélène Kaziende
Oum Ramatou (1970– )
Nigeria
Amos Tutuola (1920-1997)
Chinua Achebe (1930-)
Akinwande Oluwole Babatunde Soyinka (1934-)
Ben Okri (1959-
Nkem Nwankwo
Rwanda
Maggy Correa
Jeannine Herrmann-Grisius
Thérèse Muamini
Yolande Mukagasana
Benjamin Sehene (1959– )
Marie-Aimable Umurerwa
Marie Béatrice Umutesi (1959– )
Emmanuel Habumuremyi (1972– )
São Tomé-et-Príncipe
Olinda Beja (1946– )
Sara Pinto Coelho (1913–1990)
Conceição Lima (1962– )
Caetano da Costa Alegre (1864–1890)
M. Manuela Margarido (1925– )
Alda do Espírito Santo (1926– )
Mario Domingues (1899– )
José Francisco Tenreiro (1921–1963)
Senegal
Ousmane Sembène
Cheikh Anta Diop
Mariama Bâ
Ken Bugul
Nafissatou Niang Diallo
Aminata Sow Fall
Annette Mbaye D'Erneville
Boubacar Boris Diop
Léopold Sédar Senghor (1906-2001)
Amadou Lamine Sall
Birago Diop
David Diop
Abdou Anta Ka
Alioune Badara BEYE
Amadou Traoré Diop
Aminata Maïga Ka
Ndeye Coumba Diakhate
Nafissatou Dia Diouf
Ibrahima Malick Dia
Abdoulaye Elimane KANE
Cheikh-Hamidou Kane
Tafsir Ndické Dièye
Fatoumata Kane
Sokhna Benga
Fatou DIOM
Ousmane Socé Diop
Abdoulaye Sadji
Diallo fallémé
Sierra Leone
Edward Wilmot Blyden (1832–1912)
Syl Cheney-Coker (b.1945)
Aminatta Forna
Africanus Horton (1835–1883)
Somalie
Abdisalam Issa-Salwe
Abdi Sheik Abdi
Abdi Kusow
Ahmed Farah Ali 'Idaja' (Somali: Axmed Faarax Cali 'Idaajaa')
Cabdulqaadir Xirsi 'Yamyam'
Cali Xuseen Xirsi
Faarax Maxamed Jaamac 'Cawl' (1937-1992)
Jaamac Cumar Ciise
Maxamed Daahir Afrax
Maxamed Xaashi Dhamac 'Gaariye'
Mohamed Diriye Abdullahi
Mohamed Haji Mukhtar
Mohamed Ibrahim Warsame 'Hadrawi' (Somali: Maxamed Ibraahim Warsame Hadraawi') (1941–)
Nuruddin Farah (1945– )
Said S. Samatar
Waris Dirie
Yaasiin Cismaan Keenadiid
Afrique du Sud
Soudan [modifier]
AbdAllah al Tayeb
Tayeb Saleh
Muhammad Ahmad Mahgoub
Babikir Badri
Awn Alsharif Qasim
Mansour Khaled
Abel Alier
Ra'ouf Mus'ad
Leila Aboulela
Jamal Mahjoub
Ahmad Baba al Massufi (1556–1627)
Murwan Al-Rasheed
Ibrahim 'Ali Salman (1937– )
Abbakar Adam Ismail
Idrees Jama'a
Yousif Khalil (1943–2005)
Abdul Raheem Glaiati
Malkat Ed-Dar Mohamed
Mahmoud Mohamed Madani
Abdallah Bola
Abdullah Ali Ibrahim
Elhassan Bakrey
Bushra Elfadil
Adil Elqassas
Osman Hamid Suliman
Yahya Fadllalh
Hassan Musa
Tanzanie
Mark Behr
Euphrase Kezilahabi (1944– )
Robert Bin Shaaban (1902-1962)
Julius Nyerere (1922-1999)
Hammie Rajab
Penina Mlama
Elvis Musiba
Amandina Lihamba
Edwin Semzaba
Shafi Adam Shafi
Chachage Seith Chachage
Tchad
Marie-Christine Koundja (1957– )
Togo
Gad Ami (1958– )
David Ananou (1917–2000)
Félix Couchoro
Richard Dogbeh
Kossi Efoui (1962– )
Emilie Anifranie Ehah
Christiane Akoua Ekue (1954– )
Alemdjrodo Kangni (1966– )
Tété-Michel Kpomassie (1941– )
Pyabelo Chaold Kouly (1943– )
Lauryn
Senouvo Agbota Zinsou (1946– )
Tunisie
Voir: Liste d'écrivains tunisiens
Ouganda
Timothy Wangusa
Moses Isegawa
Catherine Samali Kavuma
China Keitetsi
Mahmood Mamdani
Rajat Neogy
Okot p'Bitek
Zambie
Solomon Mutswairo (1924– )
Zimbabwe [modifier]
Tsitsi Dangarembga (1959– )
Chenjerai Hove (1956– )
Doris Lessing
John Marangwanda
Shimmer Chinodya (1957–– )
Dambudzo Marechera (1952–1987)
Nozipa Maraire (1966– )
Charles Mungoshi
Solomon Mutswairo (1924– )
Alexander McCall Smith
Stanlake Samkange (1922–1988)
Andrew Plate (1980– )
Yvonne Vera
Musaemura Zimunya (1949– )
Elias Kudzai Manyara (1981–)
Obediah Mlilo
Marrily Runoona Kuzonyei
Publié le 24/06/2007 à 12:00 par feobus
Louis Thomas Achille (1909-???)
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Les ‘Negro Spirituals’ et l’expansion de la culture noire »
Louis Thomas Achille est né à la Martinique. Il a reçu son éducation à Paris et a commencé à écrire en vue de publication en 1931, en français comme en anglais. Catholique pratiquant, Achille a souvent écrit directement sur des sujets religieux, mais il a surtout écrit sur les problèmes raciaux et le colonialisme français. Il a parfois utilisé le nom de plume Léon Terraud. Il a écrit pour de nombreux périodiques en France, dont L'Étudiant Martiniquais ; La Revue du Monde Noir et La Revue Anglo-Américaine. Il a également travaillé à la radio pendant un certain temps, enregistrant et diffusant des Negro spirituals avec le Park Glee Club de Lyon. En 1932, il s'est rendu aux États-Unis en tant qu'instructeur dans le Département des Langues romanes à Howard University, et il est devenu plus tard Assistant Professeur de français. Aux États-Unis, Achille a exposé des tableaux de peinture à l'huile à la Howard University Art Gallery et à la National Negro Art Exhibition à Atlanta, et il a contribué des articles à de nombreuses publications, dont le Washington Post, le Washington Tribune et l'Afro-American.
Jacques-Stephen Alexis (1922-1961)
Romancier dont les œuvres politiquement engagées ont eu un profond impact sur les lettres haïtiennes.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Du réalisme merveilleux des Haïtiens »
Alexis est né dans une des familles littéraires haïtiennes. Son père, Stéphen Alexis, était l'auteur de Le Nègre masqué (1933) et avait écrit sur l'histoire haïtienne. Après avoir terminé ses études à l'Institut Saint-Louis de Gonzague, Jacques Alexis a étudié la médecine à Port-au-Prince et à Paris. Il a participé à la révolte de 1946 en Haïti, et il a été contraint de s'exiler par peur de persécution politique. Il est retourné clandestinement sur l'île en 1961, a été arrêté et est probablement mort en captivité peu après. Les deux premiers romans d'Alexis portent sur l'occupation américaine d'Haïti, et ils montrent une image complexe de la vie psychologique, sociale et politique de la population de l'île. Les tendances procommunistes de ses ouvrages expliquent les nombreuses traductions de ses livres en URSS pendant les années soixante. Ses écrits ultérieurs ont mis en valeur le folklore haïtien et ont incorporé une langue créolisée — une synthèse complexe des influences linguistiques, culturelles et politiques d'Haïti.
Édouard Andriantsilaniarivo (1912- ?)
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Le Malgache du XXème siècle »
Né à Tananarive, Madagascar, Andriantsilaniarivo est devenu professeur de lettres, et ses études et écrits universitaires ont porté sur la langue, la littérature, l'histoire, les coutumes et les traditions de Madagascar. Il a publié des articles dans divers journaux et revues, en français comme en malgache. De plus, il a participé à de nombreuses conférences et a réalisé des émissions pour diffusion à la radio à Madagascar.
Publication :
Le Théâtre malgache (1947)
Amadou Hampaté Bâ (1901?-1991)
Écrivain malien, conteur, historien et théologien islamique.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Culture peulhe »
Bâ est né dans la ville de Bandiagara au Mali. Il a fréquenté des écoles françaises à Bandiagara et à Djenné, et il a continué son éducation islamique traditionnelle auprès du célèbre intellectuel musulman Tierno Bokar. Bâ a recueilli et transcrit des fables et contes africains pendant les années vingt et trente, et il a commencé à écrire sérieusement pendant les années qui ont suivi. Le chef-d'œuvre de Bâ, L’Étrange destin de Wangrin, est un exemple de la façon dont il est parvenu à transformer la forme narrative occidentale en préservant des parties importantes de la tradition orale africaine. Tout au long des années quarante et cinquante, il a voyagé dans le Soudan français (maintenant le Mali) et la Haute Volta (maintenant le Burkina Faso), où il a collectionné de nombreux récits et légendes populaires d'Afrique. Il s'est rendu en France en 1951 pour la première fois grâce à une bourse de l'UNESCO. En 1962, il est retourné à Paris pour participer aux travaux du Conseil exécutif de l'UNESCO, pour lequel il a travaillé jusqu'en 1971.
Oeuvres choisies :
Koumen (1961)
Kaïdara (1969)
L’Étrange destin de Wangrin (1974)
Aspects de la civilisation africaine (1972)
Jésus vu par un musulman (1993)
R.P. Gérard Bissainthe (1928- )
Prêtre, ancien Recteur, Université de Port-au-Prince et ancien Ministre de Haïti. Président du Forum Francophone International.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Le christianisme face aux aspirations culturelles des peuples noirs »
Horace Mann Bond (1904-1972)
Éducateur américain et administrateur universitaire qui a dirigé les recherches historiques à l'appui de Brown v. Board of Education of Topeka, Kansas.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Reflections, comparative, on West African Nationalist Movements » (Réflexions comparatives sur les mouvements nationalistes ouest-africains)
Né à Nashville, Tennessee, Bond était un enfant précoce, qui est entré au lycée à l'âge de neuf ans et à Lincoln University, une faculté des lettres afro-américaine en Pennsylvanie, à 14 ans. Bond a obtenu un Doctorat en Éducation à la University of Chicago en 1936. La réputation de Bond dans les milieux universitaires a été établie grâce à plusieurs publications concernant l'éducation et le statut économique des noirs en Amérique. Ses « Star Creek Papers » documentent le progrès des écoles publiques dans le district Star Creek de la paroisse de Washington, et ils sont considérés comme l'une des meilleures descriptions du Sud des États-Unis à l'époque de la Dépression. Bond a passé de nombreuses années comme administrateur dans diverses universités noires et il a dirigé les efforts de soutien de la recherche à l'appui de l'affaire Brown v. Board of Education of Topeka, Kansas, qui a entraîné le rejet de la ségrégation scolaire. Il est le père de Julian Bond, activiste très en évidence dans le mouvement des droits de l'homme, qui est devenu président de la National Association for the Advancement of Colored People en 1998.
Oeuvres choisies :
The Education of the Negro in the American Social Order (1934)
Negro Education in Alabama: A Study in Cotton and Steel (1939)
Aimé Césaire (1913- )
Poète martiniquais, dramaturge et dirigeant politique, connu comme le créateur du concept de Négritude.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Culture et colonisation »
Né à Basse-Pointe, Martinique, Césaire a étudié à l'École Normale Supérieure et à la Sorbonne à Paris, France. Pendant son séjour à Paris, il a rencontré plusieurs autres écrivains noirs, dont Léopold Sédar Senghor et Léon Damas. Césaire est retourné à la Martinique pendant les années quarante, et il y a poursuivi ses activités politiques et littéraires. Pendant de nombreuses années il a été maire de Fort-de-France, le chef-lieu de la Martinique, et député à l'Assemblée nationale française. Dans son long poème Cahier d’un retour au pays natal (1939), Césaire a inventé le terme négritude. Le poème est vite devenu un classique de la littérature sur la négritude en raison de son exploration de la culture noire comme une entité valide et indépendante. Dans ce poème ainsi que dans d'autres, il dénonce également en termes très virulents l'oppression par la France des cultures indigènes de ses colonies. Césaire a aussi écrit plusieurs pièces de théâtre touchant aux thèmes du pouvoir, de la décolonisation et de l'identité noire.
Oeuvres choisies :
Cahier d’un retour au pays natal (1939; traduit sous le titre Return to My Native Land, 1968)
Soleil cou-coupé (traduit sous le titre Sun’s Slashed Throat, 1948)
Les armes miraculeuses (traduit sous le titre Miraculous Weapons, 1946)
Discours sur le colonialisme (1950 ; traduit sous le titre Discourse on Colonialism, 1972)
Toussaint L’Ouverture (1960 ; traduit en 1962)
Ferrements (traduit sous le titre Ironwork, 1960)
La tragédie du Roi Christophe (1963 ; traduit sous le titre The Tragedy of King Christophe, 1969)
Une saison au Congo (1966 ; traduit sous le titre A Season in the Congo, 1968)
Une tempête (1969 ; traduit sous le titre A Tempest, 1986)
Alioune Diop (1910-1980)
Écrivain sénégalais, éditeur, fondateur de Présence Africaine, qui a joué un rôle central dans le mouvement de la Négritude. Principal organisateur du 1er Congrès International des Écrivains et Artistes Noirs en 1956.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Discours d’ouverture »
Alioune Diop est né à Saint-Louis, Sénégal. Il a été élève au Lycée Faidherbe à Saint-Louis, puis il a fait des études en Algérie et à la Sorbonne, à Paris. Il est devenu professeur de littérature classique à Paris et a représenté le Sénégal au Sénat français après la Deuxième Guerre mondiale. En 1947, Diop a fondé Présence Africaine, et, en 1949, il a fondé les Éditions Présence Africaine, une importante maison d'édition pour auteurs africains. Il a ensuite fondé la Société Africaine de Culture (1956) et a contribué à l'organisation du premier et du deuxième Congrès International des Écrivains et Artistes Noirs à Paris et à Rome (1959) ; du premier Festival Mondial des Arts Nègres à Dakar (1966) ; et du second Festival des Arts et de la Culture Noirs et Africains à Lagos (1977). Les Ministres de la Culture des États africains au Sud du Sahara ont établi un Prix littéraire en son honneur en 1982 ; la célébration du 50e anniversaire de Présence Africaine s'est tenue à Paris en 1997 ; et les Éditions Présence Africaine sont toujours actives sous la direction of Yandé Christiane Diop, sa veuve.
Cheikh Anta Diop (1923-1986)
Historien, Égyptologue, physicien, linguiste et anthropologue physique et culturel.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Apports et perspectives culturels de l’Afrique »
Personnage central des études africaines, Diop a d'abord étudié à l'Université de Dakar. Il est ensuite allé à la Sorbonne pour y poursuivre son éducation, et il y a étudié des sujets variés en sciences comme en lettres, y compris l'histoire ancienne, l'archéologie, l'Égyptologie, la linguistique, la philosophie et la sociologie. Il a participé activement au mouvement pour l'indépendance africaine. Ce fut l'un des fondateurs de l'Association estudiantine de l'African Democratic Assembly (ou AFRDA), et il a aussi écrit des articles pour son organe de presse, La Voix de l’Afrique Noire. En outre, il a été l'un des organisateurs de la première Conférence panafricaine des Étudiants à Paris en 1951. En 1954, la thèse de Doctorat de Diop a été rejetée par la Sorbonne, mais elle a tout de même été publiée par Présence africaine. Plus tard, Diop est retourné à l'université et a défendu sa thèse avec succès. Avec son Doctorat en poche, Diop est rentré au Sénégal et a été engagé par l'Institut français d'Afrique noire (IFAN). Il y a établi le laboratoire de datation par le radiocarbone de Dakar, qui se spécialise dans la datation des matériaux archéologiques et géologiques les plus anciens d'Afrique.
Tout au long de sa carrière universitaire, Diop s'est efforcé de démontrer l'origine africaine de la civilisation et le caractère africain de l'Égypte antique. En 1971, il a été invité par l'UNESCO à contribuer à la rédaction de l'Histoire générale de l'Afrique, une histoire complète de l'Afrique en plusieurs tomes qui est devenue un classique des études africaines. Diop est devenu plus tard professeur d'histoire à l'Université de Dakar, qui a été rebaptisée en son honneur Université Cheikh Anta Diop en 1987.
Oeuvres choisies :
Antériorité des Civilisations nègres : Mythe or Vérité historique (1967)
Civilisation ou Barbarie : Anthropologie sans Complaisance (1981)
Yandé Christiane Diop
Elle est directrice des Editions Présence Africaine depuis que son mari est décédé et également Secrétaire générale de la Communauté Africaine de Culture. Son désir de poursuivre l'oeuvre de son mari lui donne la force et l'inspiration nécessaires.
Cedric Dover (1904-1961)
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Culture et créativité »
Né à Calcutta, Inde, Cedric Dover a étudié les relations entre les groupes (un type de sociologie), puis il a fait des recherches en zoologie sur le terrain en Inde et en Malaisie, et il a enseigné ce sujet. Il est ensuite devenu professeur invité d'anthropologie à Fisk University aux États-Unis. Il a continué son travail universitaire en Amérique en tant que professeur de relations entre les groupes à la New School à New York. Il a toujours été préoccupé par les problèmes des gens de couleur et par les accomplissements culturels des peuples opprimés. Il a écrit de nombreux livres sur des études sociales et ethniques, dont Half-Caste, Know this of Race, Hell in the Sunshine, Features in the Arrow et Brown Phoenix. Plus tard dans sa vie, Dover a édité une anthologie d'art noir aux États-Unis, American Negro Art (1960). Des historiens de l'art ont suggéré que l'œuvre de pionnier de Dover et de ses contemporains a contribué à la compréhension d'une « esthétique noire » dans la production culturelle.
Thomas Ekollo (1920-1996)
Pasteur camerounais, intellectuel.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « De l’importance de la culture pour l’assimilation du message chrétien en Afrique noire »
Thomas Ekollo était l’un des tout premiers pasteurs de l’Église évangélique du Cameroun, et il est resté l’une des figures marquantes du protestantisme camerounais de ces dernières décennies, tant par l’importance des responsabilités qu’il a assumées (directeur d’un collège de Douala, secrétaire général de l’enseignement protestant pour les Églises baptistes et l’Église évangélique, directeur de l’enseignement général et technique pour le compte de l’État camerounais) que par son souci constant de répondre aux questions de la société camerounaise d’aujourd’hui. L’engagement social ou œcuménique ne lui faisait pas peur, et il se souciait moins de la survie de l’institution à laquelle il appartenait que du témoignage évangélique qu’on attendait de lui. Ekollo est un homme totalement impliqué dans l’histoire et le devenir des Églises évangéliques en Afrique.
Oeuvres choisies :
Mémoires d’un Pasteur camerounais (2003)
Ben Enwonwu (1921-1994)
Sculpteur nigérian, peintre ; Conseiller en Beaux-Arts auprès du Gouvernement nigérian.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Problems of the African artist to-day » (Problèmes de l'artiste africain aujourd'hui)
Né dans la province d'Onitsha au Nigeria et éduqué dans des collèges de l'État au Nigeria avant de se rendre en Europe pour y faire ses études secondaires, Benedict Enwonwu est devenu un artiste considéré par certains comme l'artiste le plus éminent du Nigeria à son époque. Il a étudié les Beaux-Arts, l'Esthétique, l'Histoire de l'Art occidental et l'Anthropologie en Angleterre, et il a ensuite commencé une carrière artistique sérieuse. Travaillant avec des matériaux variés dans sa peinture et sa sculpture—bois, bronze, métal, plastique, plâtre, ciment, huile et aquarelles—Enwonwu a produit des œuvres qui sont restées populaires tout au long de sa carrière. Il a attiré l'attention internationale quand la Reine Elizabeth II a posé pour lui à Buckingham Palace vers la fin des années cinquante. Enwonwu a exposé des sculptures dans le monde entier, aux galeries Berkeley à Londres (1947), à Howard University (1950), à la Galerie Apollinaire (1950), au Goethe Institut (1976) et au Museum of Contemporary Art, New York (2001). Il a étudié l'aspect politique des cultures basées sur les arts visuels, et il a proposé d'utiliser l'expression artistique pour produire une représentation locale ou individuelle, même en face des formes et techniques artistiques occidentales.
Frantz Fanon (1925-1961)
Psychiatre originaire des Antilles françaises, théoricien politique dont les analyses du colonialisme ont fait de lui l'un des principaux penseurs révolutionnaires de son temps.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Racisme et Culture »
Fanon est né à Fort-de-France, sur l'île de la Martinique. Il a fait des études de médecine à Lyon, en France, et il a commencé son internat en psychiatrie. Plus tard, alors qu'il habitait en Algérie, Fanon est devenu un militant actif, luttant pour la cause de l'indépendance algérienne. Les textes universitaires de Fanon, qu'il commença à écrire sérieusement à cette époque, reflètent les influences intellectuelles de ses années en France, où il avait été attiré par le groupe d'intellectuels noirs associés à Présence Africaine. Il était également très proche du groupe d'intellectuels français associés à la revue Les Temps Modernes, notamment Jean-Paul Sartre et Albert Camus. Le travail de Fanon comme psychiatre en Algérie l'a convaincu du rapport étroit entre les pathologies individuelles de ses patients et la situation politique du pays. Il en a conclu que le colonialisme cause une condition unique à la fois chez le colonisé et chez le colonisateur, et que le seul traitement est une lutte révolutionnaire par le colonisé pour se libérer du joug colonial. Ses écrits politiques et ses discussions des questions raciales et de l'ordre social colonial lui ont garanti une place parmi les intellectuels qui ont élaboré la philosophie moderne postcoloniale.
Oeuvres choisies :
Peau noire, masques blancs (1952 ; Black Skin, White Masks, 1967)
Les Damnés de la terre (1961 ; Wretched of the Earth, 1965)
L'An V de la révolution algérienne (A Dying Colonialism, 1967)
William Fontaine (1909-1968)
Éducateur américain, professeur de philosophie à la University of Pennsylvania
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Segregation and desegregation in the United States: a philosophical analysis » (Ségrégation et déségrégation aux États-Unis : analyse philosophique)
Né dans une famille de treize enfants dans une région rurale de la Pennsylvanie, William Fontaine a obtenu son diplôme de licence in 1930 à Lincoln University, où il était président de sa classe. Il fit ensuite des études de troisième cycle à Harvard University, à la University of Chicago et à la University of Pennsylvania, où il a reçu son Doctorat et où, en 1963, il est devenu le premier professeur titulaire dans son histoire. Il a souvent voyagé à l'étranger, se rendant à des conférences à Lagos, à Dakar et en Europe—poursuivant la philosophie de la culture et cherchant à faire sortir l'étude et l'utilisation de la philosophie de son cadre purement universitaire et à la faire accepter par l'ensemble de la population. Il a également occupé le poste de secrétaire de l'American Society of African Culture pendant les années soixante. En 1970, la University of Pennsylvania a créé les Fontaine Fellowships en son honneur, pour offrir des ressources et des allocations pour les étudiants de troisième cycle noirs dans cette université, qui en bénéficient toujours aujourd'hui.
Oeuvres choisies :
Fortune, Matter and Providence (1936)
Reflections on Segregation, Desegregation, Power and Morals (1967)
Paul Hazoumé (1890- ???)
Écrivain, diplomate, l'un des premiers romanciers francophones en Afrique
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « La révolte des Prêtres »
Paul Hazoumé est né en 1890 à Porto-Novo, Dahomey (maintenant le Bénin). Il a fait ses études au Sénégal, où il a obtenu un diplôme de l'École Normale de Saint-Louis. Il a dirigé les opérations du Musée de l’Homme à Paris pendant les années trente, et il a représenté la France à la 8e Conférence générale de l'UNESCO à Montevideo. Il a également été conseiller auprès de l'Union française, Conseiller territorial au Dahomey, et lauréat de l'Académie française. La carrière littéraire de Hazoumé est aussi digne d'intérêt. Les premiers auteurs francophones noirs, au nombre desquels on doit compter Hazoumé, ont souvent écrit d'une façon qui s'opposait directement au canon des textes français, en s'efforçant de préserver l'identité culturelle de leurs nations et en dénonçant les effets destructeurs de la colonisation sur les civilisations africaines. La reconstitution imaginative par Hazoumé de l'atmosphère de la cour de l'ancien Dahomey dans Doguicimi (1935) représente le premier effort sérieux par un Africain d'adapter la langue française à l'expérience africaine au moyen d'une narration détaillée. Ce roman est également considéré comme l'un des premiers romans africains, et il a permis aux écrivains africains qui se sont engagés sur la voie ouverte par Hazoumé d'adopter son union des traditions occidentales et africaines en matière de narration en développant leurs propres littératures nationales.
Oeuvres choisies :
Doguicimi : Le premier roman dahoméen ; 1938
James Ivy (1901- ???)
Érudit, traducteur, éditeur du magazine de la NAACP The Crisis
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « The N.A.A.C.P. as an instrument of social change » (La NAACP comme instrument de changement social)
En 1949, James Ivy est devenu rédacteur en chef de The Crisis, l'organe littéraire et médiatique de la National Association for the Advancement of Colored People. The Crisis avait été fondé en 1910 par W. E. B. Du Bois pour servir de « recueil de témoignages sur l'histoire des races sombres ». Pendant qu'il a occupé ce poste, jusqu'en 1966, Ivy a dirigé les reportages du magazine sur le Mouvement des Droits civiques et sur de nombreux autres problèmes. Il a été particulièrement intéressé par la traduction d'études sur la question noire par la diaspora. Sa connaissance de multiples langues lui a permis d'explorer et de promouvoir le développement et le progrès socioculturel des gens de couleur dans le monde entier. Il a traduit personnellement en anglais de nombreux articles français, espagnols et portugais pour The Crisis.
Marcus James (??? )
Ecclésiastique jamaïcain, sociologue.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Christianity in the emergent Africa » (Le Christianisme dans la nouvelle Afrique)
James était un prêtre né en Jamaïque qui a obtenu son Doctorat à Oxford University. Il était un ecclésiastique anglican et un sociologue ; il a également été adjoint de l'aumônier de l'Université de Londres ; conseiller de Christian Action en Grande-Bretagne, une association de catholiques et de protestants collaborant sur des problèmes sociaux et internationaux, et membre du Comité d'étude de relations entre les races, Royal Institute of International Affairs.
George Lamming (1927- )
Romancier de la Barbade, critique littéraire, essayiste et éducateur.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « The Negro writer and his world » (L'écrivain noir et son monde)
Né à Carrington Village, à la Barbade, Lamming a obtenu une bourse pour étudier dans un lycée où il a fait la connaissance de l'enseignant Frank Collymore, qui était également éditeur de Bim, la nouvelle revue littéraire influente des Antilles. Il a encouragé Lamming à développer ses talents d'écrivain, talents qui se sont épanouis quand il a émigré à Londres en 1950—voyageant sur le même navire que le romancier de la Trinité Samuel Selvon. Lamming a écrit de la poésie et des nouvelles, qu'il a publiées dans Bim et diffusé en Angleterre dans le cadre de l'émission radio de la BBC appelée « Caribbean Voices ». Dès sa publication de In the Castle of My Skin (1953), un récit essentiellement autobiographique d'une enfance aux Antilles dans les années trente et quarante, Lamming fut acclamé comme un brillant romancier. Il a continué à explorer les thèmes de la décolonisation, de la reconstruction nationale aux Antilles et de l'expérience d'émigrants antillais dans de nombreux autres livres au cours des années qui suivirent. Lamming a remporté plusieurs prix prestigieux, dont une bourse Guggenheim en 1955. Il est retourné à la Barbade en 1974, et depuis lors il a donné des conférences dans de nombreuses universités à l'étranger. Ses premiers romains sont toujours considérés comme des témoignages exceptionnels de l'expérience antillaise, et Lamming continue à être reconnu comme l'un des écrivains les plus influents dans la tradition littéraire antillaise.
Oeuvres choisies :
In the Castle of My Skin (1953)
The Emigrants (1954)
Of Age and Innocence (1958)
Season of Adventure (1960)
The Pleasures of Exile (1960)
Water With Berries (1971)
Natives of My Person (1972)
Conversations: George Lamming: Essays, Addresses, and Interviews (1990)
Ebenezer Latunde Lasebikan ( ???)
Spécialiste de la langue yoruba.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « The Tonal Structure of Yoruba Poetry » (Structure tonale de la poésie yoruba)
Né à Ibadan, Lasebikan a suivi des cours spéciaux en phonétique et en linguistique à la School of African and Oriental Studies, University of London. Il a reçu son certificat pédagogique en 1951 et a occupé ensuite un poste de conseiller auprès du Commissioner for Western Nigeria, établi à Londres. Sa spécialité universitaire était la poésie yoruba : son histoire, sa sensibilité et ses structures linguistiques. Il a enseigné pendant un certain temps dans la région de Bahia, au Brésil, où la culture yoruba, importée d'Afrique avec la traite des esclaves, est particulièrement bien représentée. Il a également participé à l'émission radio de la BBC, « West African Voices ».
Oeuvres choisies :
A Yoruba Revision Course (1947)
Ojulowo Yoruba (1955)
Awom Itan Ere Shakespeares (1955)
Learning Yoruba (1958)
Albert Mangones (1917-2002)
Sculpteur haïtien, activiste et architecte.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « L’art plastique en Haïti »
Né en Haïti et éduqué en partie en Europe et à Cornell University aux États-Unis, Mangones a étudié l'ingénierie et l'architecture, mais il s'est toujours efforcé de promouvoir la préservation des arts et des cultures en Haïti. Mangones, qui appartenait à la même génération que des écrivains comme Jacques Roumain et Jean Price-Mars, a collaboré avec eux et avec d'autres artistes pour établir le Centre des Arts de Port-au-Prince, qui existe toujours, où des créateurs de toutes disciplines pouvaient se retrouver et travailler ensemble, et partager des studios dans un environnement favorable. En tant que sculpteur lui-même, Mangones a produit un grand nombre de statues au fil des ans, et son chef-d'œuvre est probablement la statue de Neg Mawon, le « Marron Inconnu », ou l'« esclave affranchi », qui est devenue une véritable icône ces dernières années comme symbole de liberté et d'indépendance dans toutes les Antilles. L'American Institute of Architecture a rendu hommage à ses accomplissements pendant les années quatre-vingt. Plus tard, en tant que directeur de l'ISPAN (Institut pour la sauvegarde du patrimoine national), il a eu la possibilité d'utiliser ses connaissances en architecture pour préserver des bâtiments et sites historiques en Haïti, dont la Citadelle et le Palais Sans Souci à Milot, Province du Nord, et l'ancienne cathédrale de Port-au-Prince.
Davidson (Abioseh) Nicol (1924-1994)
Diplomate sierra léonais, médecin, écrivain et critique littéraire.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « The Soft Pink Palms » (Les palmes douces roses)
Né à Freetown, Sierra Leone, Davidson Nicol a commencé ses études au Nigeria et a obtenu un diplôme en sciences à Cambridge University en 1946. Au début des années cinquante, il a travaillé comme médecin au Royaume-Uni, et il a reçu son Doctorat en 1958. En plus de son travail scientifique, Nicol a été un acteur très remarqué sur la scène journalistique et littéraire de l'Europe et de l'Afrique pendant la plus grande partie du siècle. Langston Hughes a encouragé Nicol à écrire, et il a publié l'une de ses premières nouvelles dans An African Treasury (1960). Nicol a également écrit pour le magazine Encounter, l'Economist, le West African Review et Présence Africaine, pour ne citer que quelques-uns des magazines pour lesquels il a écrit, et il a publié plusieurs poèmes, des nouvelles, des articles et des critiques littéraires—et comme de nombreux autres écrivains africains de l'époque, il a diffusé certaines de ses œuvres à la radio. Il a enseigné à l'Université d'Ibadan, a été le premier doyen sierra léonais de Fourah Bay College et a été vice-chancelier de l'Université de Sierra Leone. Nicol a été directeur économique d'UNITAR de 1972 à 1982 ; il est devenu le premier noir élu fellow à Cambridge, et il a représenté la Sierra Leone en tant qu'ambassadeur de ce pays au Royaume-Uni.
Oeuvres choisies :
The Truly Married Woman (1965)
Two African Tales (1965)
Africanus Horton and Black Nationalism (1969)
New and Modern Roles for Commonwealth and Empire (1976)
Nigeria and the Future of Africa (1980)
Emmanuel C. Paul (1914-???)
Journaliste haïtien, professeur à l'Institut d'Ethnologie
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « L’Ethnologie et les cultures noires »
Paul est né à Port-au-Prince, Haïti, et a été journaliste et professeur d'études ethniques. Il a publié des articles dans plusieurs revues et magazines, dont les Bulletins du Bureau d’ethnologie de la Société historique haïtienne, Optique, Le Nouveliste, Haïti-Journal et Le Jour.
Oeuvres choisies :
Notes sur le folklore haïtien (1946)
Essai d’organographie d’Haïti (1947)
Culture, Langue, Littérature (1954)
Questions d’Histoire (1955)
Panorama de Folklore haïtien (1962)
Jean Price-Mars (1876-1969)
Historien haïtien, diplomate, homme politique et ethnographe qui a précédé et influencé le mouvement de la Négritude.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Survivances africaines et dynamisme de la culture noire outre-Atlantique »
Né à Grande Rivière du Nord, Haïti, Price-Mars a étudié la médecine, l'anthropologie et la science politique en Haïti et à Paris. Il a ensuite découvert ses talents d'orateur en faisant de nombreux discours sur la culture et la politique en Haïti entre 1910 et 1930. Price-Mars a ensuite partagé son temps entre les activités politiques et des poursuites plus purement intellectuelles. Il s'est présenté à deux reprises à des élections présidentielles et a été nommé ambassadeur à Paris par François Duvalier en 1957. Price-Mars a également écrit sur l'histoire d'Haïti et sur l'importance de la fierté raciale et culturelle. Pendant la période humiliante de l'occupation d'Haïti par les États-Unis (1915-1934), Price-Mars s'est efforcé dans ses discours de rappeler aux Haïtiens leur riche héritage culturel. Bien que ses idées semblent modérées si on les compare à celles d'Aimé Césaire et de Frantz Fanon, elles étaient révolutionnaires à leur époque et dans son pays.
Oeuvres choisies :
La Vocation de l'élite (1919)
Ainsi parla l'Oncle (1928)
Une étape de l'évolution haïtienne (1929)
De Saint-Domingue à Haïti : essai sur la culture, les arts et la littérature (1959)
Silhouettes de nègres et de négrophiles (1960)
Jacques Rabémananjara (1913-2005)
Poète malgache, dramaturge
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « L’Europe et Nous »
Rabémananjara est le poète malgache qui a le plus participé à la revue Présence Africaine. Ayant passé la guerre à Paris en préparant une licence ès-lettres, il devint l’ami intime d’Alioune Diop, qui a toujours été l’âme même de cette revue. Lorsqu’il revint dans son pays, il fut inculpé dans la rébellion malgache, fut interné pendant plus d’un an, condamné a mort, puis enfin libéré. Il avait eu le temps d’écrire Antsa, qui est son meilleur poème, avec Lamba qui parut un peu plus tard. La vigueur et la sincérité de ces poèmes avaient suscité un tel enthousiasme chez les étudiants de Paris qu’il fut un temps où l’on citait Senghor, Césaire et Rabémananjara comme les trois grands poètes de la Négritude. Mais ses deux pièces Les Dieux malgaches et Les Boutriers de l’aurore, ainsi que son dernier recueil Antidote, n’ont hélas pas tenu les promesses d’un talent qui, bien que trop déclamatoire et trop dépendant de Verlaine, de Césaire et d'Eluard, semblait pouvoir s’élever un jour jusqu’aux sommets de l'épopée.
Oeuvres choisies :
Sur les marches du soir (1942)
Antsa (1947)
Les Dieux malgaches (1947)
Lamba (1956)
Nationalisme et problème malgache (1958)
Antidote (1961)
Léopold Sédar Senghor (1906-2001)
Érudit, poète, philosophe, homme d'État et Président du Sénégal de 1960 à 1981.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « L’esprit de la civilisation ou les lois de la culture négro-africaine »
Né à Ndjitor, Sénégal, d'un père sérère et d'une mère peulhe, Senghor s'est efforcé de représenter tous les peuples du Sénégal dans ses écrits et dans ses activités politiques. Après avoir obtenu son Baccalauréat en 1928, Senghor obtint une bourse pour étudier à la prestigieuse École Normale Supérieure à Paris. Senghor a écrit sa thèse sur Charles Baudelaire, et il a étudié les fondements intellectuels de la pensée politique française entre les deux guerres mondiales. En 1932, Senghor rencontra Aimé Césaire, avec lequel il fonda un journal, L'Étudiant Noir, et, parallèlement, un nouveau mouvement artistique et intellectuel, la Négritude. Il expliqua plus tard que la philosophie incorpore la « somme totale des valeurs africaines de civilisation ». Enseignant ensuite dans des universités françaises, Senghor vit sa carrière universitaire et littéraire s'épanouir avec la publication de plusieurs livres de poésie en français qui remportèrent des prix littéraires. Senghor se lança en même temps dans la politique, à la fois en France et au Sénégal, et il y remporta des succès tout aussi impressionnants. En 1945 et en 1946 Senghor fut élu pour représenter le Sénégal à l'Assemblée constituante française, et il fut élu premier Président du Sénégal en 1960.
Oeuvres choisies :
Chants d’ombre (1945)
Hosties noires (1948)
Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache (1948)
Éthiopiques (1956)
Nocturnes (1961)
Lettres d’hivernage (1973)
Élégies majeures (1979)
La poésie de l'action : conversation avec Mohamed Aziza (1980)
Ce que je crois (1988)
Abdoulaye Wade (1926- )
Politologue, Président actuel du Sénégal (2000- ).
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « L’Afrique Noire doit-elle élaborer un droit positif ? »
Né à Kébémer, Sénégal, Wade a fait ses études primaires au Sénégal, mais après avoir obtenu une bourse d'études, il est entré au lycée à Paris, où il a suivi des cours de mathématiques élémentaires et de mathématiques supérieures. Il a étudié dans des universités variées en France, et il a reçu son Doctorat en droit et en sciences économiques. Il plaida quelques années au barreau de Besançon, avant de revenir au Sénégal pour ouvrir son cabinet d'avocat et s'inscrire à l'Université de Dakar comme chargé de cours. Il devint professeur agrégé des Facultés de droit et de sciences économiques. En tant qu'expert et consultant, il apporta sa contribution à l’Organisation de l'Unité Africaine, ainsi qu'à la Banque Africaine de Développement. Il créa le P.D.S (Parti Démocratique Sénégalais) en 1974, dont il fut le secrétaire général, et il est devenu député en 1978. Candidat malheureux à quatre reprises à l'investiture suprême, il fut deux fois Ministre d'État dans les années quatre-vingt-dix. Sa cinquième candidature à l'élection présidentielle, en mars 2000, fut couronnée de succès au second tour face au Président sortant Abdou Diouf. Il est également l'auteur de divers ouvrages et publications, dont "Un destin pour l'Afrique", "Économie de l'Ouest africain" et "Unité et croissance."
Richard Wright (1908-1960)
Écrivain américain, dont les romans et les nouvelles ont contribué à redéfinir les discussions sur les relations raciales en Amérique au milieu du 20e siècle.
Titre de la présentation au Congrès de 1956 : « Tradition and industrialization. The plight of the tragic elite in Africa » (Tradition et industrialisation. Le fardeau de l'élite tragique en Afrique)
Élevé essentiellement par des parents éloignés près de Natchez, Mississippi, Richard Wright abandonna l'école à l'âge de 17 ans. Pendant la Grande dépression, Wright a participé à divers projets de rédaction et d'édition pour le Federal Writers' Project à Chicago. Son premier livre, Uncle Tom's Children (1938 ; révisé en 1940) remporta le premier prix à un concours littéraire organisé sous l'égide du Projet. Wright s'installa plus tard à New York, où il a continué à écrire des œuvres de fiction. En 1939, une bourse Guggenheim a permis à Wright d'écrire son chef-d'œuvre, Native Son. Ce livre explore les pressions psychologiques violentes qui poussent un jeune noir, Bigger Thomas, à commettre un meurtre. Le livre fut immédiatement un grand succès auprès des lecteurs blancs comme noirs, ce qui lui a gagné un public étendu, tout en lui valant des critiques pour ses tendances socialisantes. Wright avait adhéré au Parti communiste à Chicago, et il en est resté un membre actif jusqu'aux années quarante, quand il a quitté le parti pour des raisons idéologiques. Wright s'est exilé en France à la fin des années quarante. Il a publié plusieurs autres romans et ouvrages non romanesques pendant le reste de sa vie. Son premier ouvrage autobiographique, Black Boy (1945), révèle en termes à la fois personnels et amers l'impact dévastateur des préjugés raciaux sur les jeunes noirs aux États-Unis. Wright s'est opposé publiquement au racisme et a été peut-être le porte-parole le plus éloquent des noirs de sa génération aux États-Unis.
Publié le 24/06/2007 à 12:00 par feobus
Le « procureur » Fanon qualifia le livre de « Mayotte » d’ « énorme mystification » et d’ « ouvrage au rabais, prônant un comportement malsain ». Il dénonça la toute puissance du paternalisme parisien et blanc qui voyait d’ un très bon œil une Antillaise entériner la supériorité de leur petit monde sur le sien. « Mayotte Capécia » répondait à ce que Sophie Bessis a nommé l’injonction mimétique (28) : exiger des Autres qu’ils correspondent à l’image que l’on se fait d’eux afin de dépasser ce qu’ils sont réellement.
Les raisons de la colère du « procureur » ? Mayotte est une femme qui rêve du Blanc mythique comme d’ autres rêvent de l’ american dream. Le Blanc représente tout pour elle : le beau, le bon, le juste. En revanche, les mots durs, la diffamation, les préjugés raciaux réducteurs, elle les réserve tous aux seuls Noirs. Elle ne jure que par le Blanc qu’ elle sacralise au point où elle écrira : « je décidai que je ne pourrais aimer qu’ un Blanc, un blond avec des yeux bleus, un Français » (29)
Ainsi les choses sont claires, « c’ est vers la lactification que tend Mayotte. Car enfin il faut blanchir la race ; cela toutes les Martiniquaises le savent, le disent, le répètent » (30)
« Mayotte Capécia » l’ affirme sans retenue : « J’ aurais voulu me marier, mais avec un Blanc ». Et le « procureur » tempête :
« Mayotte aime un Blanc dont elle accepte tout. C’ est le seigneur. Elle ne réclame rien, n’ exige rien, sinon un peu de blancheur dans sa vie. Et quand, se posant la question s’ il est beau ou laid, l’ amoureuse dira : " tout ce que je sais, c’est qu’ il avait les yeux bleus, les cheveux blonds, le teint pâle, et que je l’ aimais " - Il est facile de voir, en remettant les termes à leur place, qu’ on obtient à peu près ceci : " je l’ aimais parce qu’ il avait les yeux bleus, les cheveux blonds et le teint pâle ". Et nous qui sommes Antillais, nous le savons que trop : le nègre craint les yeux bleus, répète-t-on là-bas » (31)
Son « insularité » est telle qu’ à vingt ans, Mayotte refuse de s’ imaginer que Dieu puisse être autre chose que blanc : « J’ ai vu depuis au cinéma, le film des « Verts pâturages » dans lequel les anges et Dieu lui-même sont noirs, et cela m’ a terriblement choquée, témoigne-t-elle. Comment imaginer Dieu sous les traits d’ un nègre ? Ce n’est pas ainsi que je me représente le paradis. Mais après tout, il ne s’ agissait que d’ un film américain » (32)
Décidément, pour « Mayotte », « le Dieu bon et miséricordieux ne peut être noir, c’ est un Blanc qui a des joues bien roses. Du noir au blanc, telle est la ligne de mutation. On est blanc comme on est riche, comme on est beau, comme on est intelligent » (33)
Dieu est blanc, comme les anges et tout ce qui est juste, grand et beau. Un Dieu et des anges noirs ne correspondent pas à sa réalité. À la réalité.
Un jour, « Mayotte » découvre que sa grand-mère était blanche ( « je m’ en trouvais fière » déclare-t-elle ) mais « au lieu de se découvrir noire absolument, elle va accidentaliser ce fait ». Elle s’explique enfin la pâleur de teint de sa mère qui était donc une métisse : « J’aurais dû m’ en douter avec son teint pâle. Je la trouvais plus jolie que jamais, et plus fine et plus distinguée. Si elle avait épousé un Blanc, peut-être aurais-je été tout à fait blanche ? …Et que la vie aurait été moins difficile pour moi ? (…) » (34)
Parce qu’ elle a du sang européen, la mère de « Mayotte » est donc plus fine et plus distinguée, d’un coup de baguette magique. Ces caractéristiques seraient inhérentes à la « race » blanche. Le « procureur » n’en démordra pas : Mayotte demeure une de « ces femmes de couleur échevelées, en quête du Blanc » qui fantasment « à une nuit merveilleuse, à un amant merveilleux, un Blanc » (35). Et rien d’autre.
Des propos durs ? Certes ! très durs - ce reproche de la radicalité a toujours été fait à l' homme : déjà, sa conception très virile de la révolution effrayait ses plus fervents défenseurs. Mais ces propos n’ ont d’ égal que la pathétique image que « Mayotte Capécia » vendait d’ elle-même et des Antillais. Les défenseurs de « Mayotte » réclamant une certaine indulgence à son égard, devraient s’ inspirer d’ un mot de Victor Schœlcher qui soutenait que « pour mériter la sympathie des hommes de bon sens et de bon cœur, le premier devoir serait de se mettre de niveau avec la civilisation et d’ accorder aux autres ce [que l’ on réclame] pour [soi-même] »
Fanon relèvera d’ailleurs certaines incohérences dans le récit de Mayotte. Notamment, lorsqu’ elle dit : « avoir connu Fort-de-France très tard, vers dix-huit ans ; pourtant les villas de Didier [ NDR : qu’elle évoque dans son récit] avaient charmé son enfance. Il y a dans ce fait une inconséquence que l’ on comprend si l’ on situe l’ action. Il est habituel en effet, en Martinique, de rêver à une forme de salut qui consiste à se blanchir magiquement. Une villa à Didier, son insertion dans la société de là-haut ( la colline de Didier domine la ville ), et voici réalisée la certitude subjective de Hegel » (36)
On ne comprendra que plus tard ces incohérences. En 1993, on apprend que « Mayotte Capécia » était en fait le pseudonyme d’ une jeune femme nommée Lucette Céranus Combette. Morte à 39 ans - elle aussi d’ un cancer, comme son « procureur » - Lucette Combette avait une culture tellement limitée qu’ elle n’ aurait jamais pu écrire aucune ligne de « ses » deux romans.
Ces « nègres » - on préfèrera le terme anglais de Ghost writers d’ ailleurs - étaient des auteurs blancs, des Français de France - l’ un d’ eux était l’ amant de Lucette mais son nom n’ a pas été révélé. Les rédacteurs des deux ouvrages ont utilisé la vie de « Mayotte Capécia » pour surfer sur la vague de l’ exotisme doudouiste et servir aux Français une image qui allait conforter leur arrogance vis-à-vis des Français d’ outre-mer. Il fallait mettre en scène les emblèmes de cette domination blanche sur les Autres en persuadant les Français que la manière qu’ ils ont de traiter leurs colonisés est juste : la preuve ! même cette femme, qui venait de ces endroits coupe-gorge, était d’ accord avec cette réalité « objective ».
Ainsi, la jeune « Mayotte » nous est présentée, à travers la plume de ses gost writers, sous les traits d’ une arriviste prête à tout pour sortir de son milieu. Y compris, à ridiculiser les siens auprès d’un public hexagonal très friand de tout ce qui relève de l’infériorisation de l’ altérité.
Christiane Makward, professeur de littérature française contemporaine aux USA, écrira la biographie (37) de « Mayotte », en essayant au passage de régler son compte à Frantz Fanon. Elle accuse ce dernier d’ avoir dépeint une femme courageuse et presque analphabète comme étant une petite écervelée totalement aliénée, sans même connaître son background. Fanon aurait été victime de ses propres préjugés de machiste antillais et d’ érudit ayant fait de hautes études. Or l’on ne connaîtra la réelle identité et l’ histoire de « Mayotte Capécia » qu’ en 1993, soit, plus de trente ans après la mort de Fanon.
Celui-ci était donc supposé deviner la supercherie à l’ époque où « Mayotte » elle-même se plaisait à défendre le contenu de son livre sans états d’âme. Frantz Fanon n’ est pas responsable du fait que Lucette-Mayotte validait le contenu narratif de « son » ouvrage au moment où il écrit Peau noire, masques blancs. S’ il a été induit en erreur, la faute en incombe à la seule « Mayotte » qui chercha par tous les moyens à sortir de sa condition, quitte à répondre aux sirènes dégradantes de l’ injonction mimétique. Le dupé n’ a pas à être tenu pour responsable de la duperie orchestrée pour des raisons non-avouables.
On a remis un livre au jeune Fanon et l’ auteur supposé de ce livre assumait totalement celui-ci. Point. Sur cette base, Fanon a fait son travail et s’ est contenté d’ effectuer une analyse de ce qu’ il lut. Il est dans son rôle : sonder l’ inconscient et expliquer ses effets sur le comportement des hommes et des femmes colonisés.
« Mayotte Capécia » est dépeinte par Christiane Makward comme une « héroïne » (sic) qui n’ avait pas une grande culture. Son rêve n’ était pas vraiment de blanchir sa race, comme le prétend Fanon, « mais de poursuivre le rêve fondamental de bonheur, de sécurité affective, qu’ aucune femme dans son ascendance n’ avait encore connus et qui semblent plus accessibles auprès du Blanc dans l’ imaginaire de l’ Antillaise » (38) ( sic)
La préface de cette biographie est assez particulière. Christiane Makward base son livre sur le reproche fait à Frantz Fanon d’ avoir taillé en pièce la pauvre « Mayotte » en martelant qu’ elle était négrophobe et aliénée. Et que trouve-t-on dans la préface de cette même biographie ? Exactement, les mêmes reproches : « Jamais, insiste le préfacier Jack Corzani, une Martiniquaise n’ a aussi naïvement et sincèrement avoué sa propre " aliénation ", son désir de " blanchiment ", son mépris du nègre " sauvage ", toutes choses que Frantz Fanon et quelques autres devaient violemment dénoncer » (39). Jack Corzani, qui ne porte pas Frantz Fanon dans son cœur, est donc convié, en tant que préfacier, à saper les premières lignes des théories de Fanon. Et dans son exercice, il reprend exactement les mêmes termes qui admettent l’aliénation et le désir de blanchiment de « Mayotte ». Il va bien falloir finir par admettre que si tout lecteur est amené à percevoir ces aspects peu reluisants c’ est, peut-être, bien parce qu’ ils existent, tout simplement.
L’ universitaire français René Etiemble écrira un article en 1950 - soit bien avant la sortie de Peau noire, masques blancs - au sujet de « Mayotte Capécia ». Et on y lit le même type de désapprobation :
« On ne lui en voudrait si, page 201, elle ne se déclarait incapable de " supporter leur ignorance, leurs superstitions ", à ces sales nègres. Donc elle a des excuses, Madame Capécia ; et cette vulgarité, que j’oubliais, qui rend son livre si pénible. " Je vivais avec un blanc, un officier " (...) Vous vous trompez, Madame. Tous les blancs ne sont pas des officiers pétainistes. Il est vrai qu’un blanc, de ceux que je respecte, ne saurait estimer les femmes de couleur qui, pour lui complaire, feraient aux noirs la haies de dos (...) » (40)
Dans La négresse blanche, Frantz Fanon note que « Mayotte Capécia » a tenté de prendre le contre-pied de Je suis martiniquaise en évoquant les nègres de manière plus positive. Mais rien n’ y fait : « tous les nègres qu’ elle décrit sont en quelque sorte des crapules ou des '' Y’a bon banania ''(…). Qu’elle n’ enfle plus le procès du poids de ces imbécillités. Partez en paix, ô éclaboussante romancière…Mais sachez que, au-delà de vos cinq cents pages anémiées, on saura toujours retrouver le chemin honnête qui mène au cœur. Ce, malgré vous » (41)
« nous avons voulu analyser certains comportements, nous n’avons pu éviter l’apparition de phénomènes nauséeux. Le nombre de phrases, de proverbes, de petites lignes de conduite qui régissent le choix d’un amoureux est extraordinaire aux Antilles. Il s’agit de ne pas sombrer de nouveau dans la négraille, et tout Antillaise s’efforcera, dans ses flirts ou dans ses liaisons, de choisir le moins noir (…) Nous connaissons beaucoup de compatriotes, étudiantes en France, qui nous avouent avec candeur, une candeur toute blanche, qu’elles ne sauraient épouser un Noir ( S’être échappée et y revenir volontairement ? Ah non, merci).
[…] Dernièrement, nous nous entretenions avec l’une d’entre elles. À bout de souffle, elle nous jeta à la face : ’’ d’ailleurs, si Césaire revendique tant sa couleur noire, c’est parce qu’il ressent bien une malédiction. Est-ce que les Blancs revendiquent la leur ? En chacun de nous il y a une potentialité blanche, certains veulent l’ignorer ou plus simplement l’inversent. Pour ma part pour rien au monde je n’accepterais d’épouser un nègre ’’. De telles attitudes ne sont pas rares, et nous avouons notre inquiétude, car cette jeune Martiniquaise, dans peu d’années, sera licenciée et ira enseigner dans quelque établissement aux Antilles. On devine aisément ce qu’il adviendra »
Après Je suis martiniquais, c’est au tour de Nini la mulâtresse, de l’ écrivain sénégalais Abdoulaye Sadji, d’ être analysé. Ce sont les rapports de fascination de la « femme de couleur » face au blanc qui sont encore examinés, puis ensuite ceux du Noir devant la femme de couleur :
« D’ abord il y a la négresse et la mulâtresse. La première n’ a qu’ une possibilité et un souci : blanchir. La deuxième non seulement veut blanchir, mais éviter de régresser. Qu’ y a-t-il de plus illogique, en effet, qu’ une mulâtresse qui épouse un Noir ? Car, il faut le comprendre une fois pour toutes, il s’ agit de sauver la race » (42)
Nini est une mulâtresse de Saint-Louis du Sénégal. Peu de gens savent que l’ abolition de l’ esclavage de 1848, prononcée dans les colonies françaises des Caraïbes et de l’Océan Indien, concernait aussi la ville de Saint-Louis du Sénégal et l’ île de Gorée. La ville de Saint-Louis s’ est socialement constituée - comme toutes les cités coloniales - autour d’ une base raciale, avec des communautés de mulâtres intercalées entre les nègres et les Blancs. La même structure de domination fondée sur une hiérarchie raciale produira les mêmes effets des deux côtés des rives de l’Atlantique : fascination du Blanc, haine métis-Noirs puis inter-noirs etc.
Mactar, le prétendant qui veut en faire de Nini sa dulcinée, est comptable dans les Entreprises Fluviales. L’homme est un bachelier cultivé. Mais il est noir. Et le Noir rédige une déclaration d’amour à l’adresse de Nini, la mulâtresse, cette « petite dactylographe, toute bête, mais qui possède la valeur la moins discutée : elle est presque blanche ». Le nègre aliéné sait que, pour s’ adresser à une personne qu’ il conçoit comme supérieure à lui, il doit la flatter en lui faisant comprendre qu’ il respecte la verticalité qui fonde le sens de la hiérarchie raciale. Mactar s’ exécute donc :
« On s’ excusera presque d’ oser proposer un amour noir à une âme blanche, souligne Fanon. Cela nous le retrouvons chez René Maran : cette crainte, cette timidité, cette humilité du Noir dans ses rapports avec la Blanche, ou en tout cas avec une plus Blanche que lui. De même que Mayotte Capécia accepte tout du seigneur André, Mactar se fait esclave de Nini la mulâtresse. Prêt à vendre son âme. Mais c’ est une fin de non-recevoir qui attend cet imprudent. La mulâtresse trouve que cette lettre est une insulte, un outrage fait à son honneur de " fille blanche ". Ce nègre est un imbécile, un bandit, un malappris qui a besoin d’ une leçon ; elle lui apprendra à être plus décent et moins hardi ; elle lui fera comprendre que les " peaux blanches " ne sont pas pour " Bougnouls ". En l’ occurrence, la mulâtraille fera chorus à son indignation. On parle d’ envoyer l’ affaire en justice, de faire comparer le Noir en cours d’ assises. '' On va écrire au chef de service des Travaux publics, au gouverneur de la Colonie, pour leur signaler la conduite du Noir et obtenir son licenciement comme réparation du dégât moral qu’ il a commis " » (43)
On voit que le traitement réservé au Noir pour avoir déclaré sa flamme à une mulâtresse est synonyme de déshonneur, horreur, humiliation. Et cette effronterie est perçue comme telle par une bonne partie de la « communauté ». En revanche, lorsque le bruit court qu’ un Blanc de France veut épouser Dédée la mulâtresse, les termes rugueux font place à de mielleux commentaires. Abdoulaye Sadji en rajoute une couche :
« [cette nouvelle du mariage entre une mulâtresse et un Blanc de France] couronne un certain rêve de grandeur, de distinction, qui fait que toutes les mulâtresses, les Ninis, les Nanas et les Nénèttes vivent hors des conditions naturelles de leur pays. Le grand rêve qui les hante est celui d’ être épousées par un Blanc d’Europe. On pourrait dire que tous leurs efforts tendent vers ce but, qui n’ est presque jamais atteint. Leur besoin de gesticulation, leur amour de la parade ridicule, leurs attitudes calculées, théâtrales, écœurantes, sont autant d’ effet d’ une manie des grandeurs, il leur faut un homme blanc, tout blanc, et rien que cela (…) » (44)
Pour Fanon, cette aristocratie racialisante de la société Saint-Louisienne s’ explique par l’ intégration de la mulâtraille « dans une collectivité [blanche] qui semblait hermétique. La moins-value psychologique, ce sentiment de diminution et son corollaire, l’ impossibilité d’ accéder à la limpidité, disparaissaient totalement (…) » (45). Le bonheur est à portée de main. Aussi, lorsque que la mulâtresse Dédée épouse son amoureux blanc, la cérémonie se déroule dans une atmosphère explosive car, si la plupart des mulâtresses avaient des cavaliers blancs, on avait adjoint des mulâtres à trois ou quatre d’ entre elles. Scandale ! Humiliation ! Les familles des quatre infortunées y voient un déshonneur et cette « offense […] exigeait d’ ailleurs une réparation » (46)
La négrophobie est la parfaite compagne de l’ aliénation. Là où le racisme a déposé ses valises, rien de bon n’ a émergé. En ces temps, il était quasiment impossible que des rapports sains n’ émergent entre Blancs et Noirs, mais surtout entre Noirs et mulâtres, et Noirs entre eux. Pourtant, certains prennent encore toutes ces sociétés coloniales basées sur la haine du Noir comme « modèle de tolérance » sans, bien entendu, tenir compte de la réalité historique.
Écoutons encore Fanon sur le sujet de la négrophobie :
« Dans " Magie noire ", Paul Morand nous décrivait pareil phénomène, mais nous avons appris par la suite à nous méfier de Paul Morand. Du point de vue psychologique, il peut être intéressant de poser le problème suivant. La mulâtresse instruite, l’ étudiante en particulier, a un comportement doublement équivoque. Elle dit : " Je n’ aime pas le Nègre, parce qu’ il est sauvage. Pas sauvage au sens cannibale, mais parce qu’ il manque de finesse." Point de vue abstrait. Et quand on lui objecte que des Noirs peuvent lui être supérieurs sur ce plan, elle allègue leur laideur. Point de vue de la facticité. Devant les preuves d’ une réelle esthétique noire, elle dit ne pas la comprendre ; on essaie alors de lui révéler le canon : battement des ailes du nez, un arrêt en apnée de la respiration, " elle est libre de choisir son mari ". Appel en dernier ressort à la subjectivité » (47)
Le chapitre consacré à l’écrivain René Maran, note les mêmes comportements de mystifié. C’est « parce qu’ ils se sentent inférieurs » que les Noirs comme Maran « aspirent à se faire admettre dans le monde blanc » (48). Car Fanon, là encore très dur comme à son habitude dans sa critique, accuse l’écrivain antillais de s’ être soumis aux desiderata du père de sa bien-aimée blanche qui acceptait de lui donner la main de sa fille à condition qu’ il soit tout sauf un nègre. Et Maran, le nègre, répond à la requête du futur beau-père en se blanchissant au maximum à ses yeux. Pour Fanon, « Jean Veneuse », alias René Maran, ne dit rien d’autre que « je pense en français, ma religion est la France. M’ entendez-vous, je suis Européen, je ne suis pas un nègre, et pour vous le prouver je m’ en vais en tant que commis civil, montrer aux véritables nègres la différence qui existe entre eux et moi » (49)
Publié le 24/06/2007 à 12:00 par feobus
La première partie du livre s’intitule « le Noir et le langage » et se propose de décortiquer la manière dont le colonisé s’oblige à mettre sa propre culture et sa langue en jachère afin d’adopter le langage du maître civilisateur.
Pour exemple, celui du « noir Antillais [qui se verra] d’autant plus blanc, c’est-à-dire se rapprochera d’autant plus du véritable homme, qu’il aura fait sienne la langue française » (9). L’Antillais qui connaît la métropole est comme « un demi-dieu » aux yeux des autres. Il a vu le monde civilisé. Aussi, se permet-il de revenir « se faire consacrer » auprès de l’ « indigène » des îles, celui « qui-n’est-jamais-sorti-de-son-trou, le bitaco »(10)
Débarquant en France, il pousse son désir de se détacher des stéréotypes négatifs en luttant absolument contre « le mythe du Martiniquais qui mange-les-R » et s’oblige, au contraire, à les rouler comme personne ne les roule plus en France.
Fanon se navre d’ailleurs de la pauvreté d’une littérature antillaise pensée et écrite en créole. Le créole serait plus sauvage que le français ou, si l’on veut, moins civilisé. Il est donc rejeté en tant qu’expression d’un imaginaire local auquel on substitue le français, LA langue par excellence. Des générations entières d’Antillais de cette époque se sont vues interdire l’utilisation du créole par leur propre famille, histoire de maîtriser la langue réelle, sans l’accent exotique qui ne fait pas très « évolué » au goût de certains.
Aux Antilles, on parle la langue officielle de la France - qui est le français - et « les instituteurs surveillent étroitement les enfants pour que le créole ne soit pas utilisé ». Impossible de s’émanciper sur ces points tant la domination jacobine est oppressante.
On peut se féliciter qu’il y ait des « ouvrages traduits du ouolof ou du peuhl » et le psychiatre suit d’ailleurs « avec beaucoup d’intérêt les études de linguistique de Cheik Anta Diop » mais Fanon attend toujours le réveil créole.
Chez le mystifié-mystificateur Blanc, le problème du langage se pose aussi. Des médecins blancs, face à des Noirs ou des Arabes des colonies, s’autorisent toujours, ou presque, à leur parler petit-nègre.
Frantz Fanon remarqua ce trait de condescendance chez la plupart de ses confrères médecins : « Bonjour, mon z’ami ! Où y a mal ? Hé ? Dis voir un peu ? Le ventre ? Le cœur ? » (11)
S’ il n’y a pas la revendication clairement affichée de rabaisser les indigènes, les médecins adoptant ce genre d’attitudes ne font rien d’autre que perpétuer un rapport de domination en s’adressant à eux comme s’ils étaient d’une humanité inférieure. Certes, pour se défendre, les paternalistes pourront toujours prétendre que « parler aux nègres de cette façon, c’est aller à eux, c’est les mettre à leur aise, c’est vouloir se faire comprendre d’eux, c’est les rassurer » (12) mais le fond du problème demeure.
Ce sont les militaires français de l’armée coloniale qui inventèrent le « petit-nègre », appelé originellement le « français tirailleur». Il fut conçu afin de faciliter la communication entre le commandement français et les soldats indigènes puis est resté dans l’imaginaire français comme symbole du langage de la majorité des Africains : moi y’en a être content être ici et y servir armée français.
Pour Fanon, « parler petit-nègre à un nègre, c’est le vexer, car il est celui-qui-parle-petit-nègre » (13) et c’est « justement cette absence de volonté, cette désinvolture, cette nonchalance, cette facilité avec laquelle on le fixe, avec laquelle on l’emprisonne, on le primitivise, l’anticivilise, qui est vexante » (14). Ce sont les attitudes qu’ont en propre les « salauds ». Lui se fait un devoir moral de parler correctement à ses patients, et ce, quelque soit leur niveau de maîtrise du français. Il se « refuse à toute compréhension paternaliste » (15). Il s’ « adresse toujours aux " bicots " en français correct, et [a] toujours été compris » (16)
Le Blanc définit ce qui correspond à sa conception du raffinement puis établit non seulement une norme mais, plus encore, une non-distance entre ce raffinement et les attributs de sa propre culture, de sa propre civilisation. Dans le même temps, il installe une distance entre ce même indigène et la culture dominante qu’est la sienne. Dans cette approche, le Noir, et plus largement le colonisé, obéit à ce règlement et a l’impression d’exister en se reconnaissant dans ce que l’homme, le vrai, a de plus cher : sa langue, sa femme type, ses vêtements, sa nourriture, ses mythes, sa religion etc.
Parmi les colonisés, il y a une lutte pour obtenir la meilleure place auprès du Blanc. C’est à celui qui en sera le plus proche. Chacun veut se déterminer sous les meilleurs aspects, avec comme seul souci de s’éloigner le plus possible de la dernière place, celle qui incarne le sauvage à l’état pur. Chacun revendique sa non-distance, donc sa proximité avec le modèle blanc. Il n’est certes pas blanc, mais il est tout de même différent de ce qui se fait de pire :
« Nous avons connu, poursuit Fanon, et malheureusement nous connaissons encore, des camarades originaire du Dahomey ou du Congo qui se disent Antillais ; nous avons connu et nous connaissons encore des Antillais qui se vexent quand on les soupçonne d’être Sénégalais. C’est que l’Antillais est plus " évolué " que le Noir d’Afrique : entendez qu’il est plus près du Blanc ; […] Cependant pour beaucoup d’Antillais cette situation n’est pas ressentie comme bouleversante mais comme tout à fait normale. Il ne manquerait plus que ça, nous assimiler à des nègres ! […]» (17)
Pour ces étudiants du Dahomey ou du Congo qui se font passer pour antillais, le but n’est pas seulement de fuir une couleur - car c’est impossible pour eux. Ils veulent fuir le statut de dernier de la classe ( humaine ), la place de sauvage assignée par le monde civilisé. En se disant antillais, ils sont tout simplement moins sauvages que ceux qui sont juste africains. Ils sont montés en humanité.
Le cas de ces Antillais tombant en état de démence à la moindre allusion à l’Afrique, s’explique par le même cheminement intellectuel. Frantz Fanon décrit ce rejet par un fait simple : aux Antilles, la vision du monde se résume dans 4 mots qui sont « nos pères, les Gaulois ». C’est à partir de cette vision assimilatrice qu’il déclare : « L’Antillais ne se pense pas Noir ; Il se pense antillais. Le nègre vit en Afrique. Subjectivement, intellectuellement, l’Antillais se comporte comme un Blanc. Or c’est un nègre. Cela, il s’en apercevra une fois en Europe, et quand on parlera de nègres il saura qu’il s’agit de lui aussi bien que du Sénégalais » (18) Mais, précise-t-il, on ne doit pas oublier que l’Antillais est d’abord français et qu’il est amené « à tout instant à vivre avec des compatriotes blancs » (19). Raison pour laquelle il ne doit pas s’enfermer dans un imaginaire exclusivement noir qui le condamnerait à créer « des chansons pour enfants noirs » et des « ouvrages d’histoire » du même type.
Fanon est révolté par l’image du Noir au cinéma. Quand il lui arrive d’aller voir un film américain, il appréhende l’ apparition du bon négro ridicule à l’écran. À quel moment va t-il arriver celui-là ? Quand va t-il faire mourir de rire la salle en jouant son rôle d’arriéré, engoncé dans ses tares, elles-mêmes consubstantielles à sa « race » ?
Mais surtout, son obsession c’est la figure du nègre Y’ a bon banania. Dans le film Requin d’acier, le nègre servant dans un sous-marin est à l’image de ce mythe banania : trouillard et servile. Il tremble « au moindre mouvement de colère du quartier-maître » et sera « finalement tué dans l’aventure (…). Oui, au Noir on demande d’être bon négro ; ceci posé, le reste vient tout seul(…) » (20)
Quelque soit la névrose, celle-ci est d’abord le corollaire de la situation culturelle. C’est par ce biais que circule la dévalorisation du Noir :
« il y a une constellation de données, une série de propositions qui, lentement, sournoisement, à la faveur des écrits, des journaux, de l’éducation, des livres scolaires, des affiches, du cinéma, de la radio, pénètrent un individu - en constituant la vision du monde de la collectivité à laquelle il appartient. Aux Antilles, cette vision du monde est blanche parce qu’aucune expression noire n’existe (…). C’est seulement à l’apparition d’Aimé Césaire qu’on a pu voir naître une revendication, une assomption de la négritude. La preuve la plus concrète, d’ailleurs, en est cette impression que ressentent les jeunes générations d’étudiants [antillais] débarquant à Paris : il leur faut quelques semaines pour comprendre que le contact de l’Europe les oblige à poser un certain nombre de problèmes qui jusqu’alors ne les avaient pas effleurés. Et pourtant ces problèmes ne manquaient pas d’être visibles » (21)
Le Noir capte son image dépréciée à travers plusieurs supports de communication. Honteux et gêné de ce qu’il voit, il rejette violemment celle-ci et se convainc de ne pas en être. Ainsi naît la négrophobie. Le souci est de prendre le contre-pied radical de ce que le Blanc montre du Noir. Si les Blancs rient du nègre sauvage que les actualités coloniales présentent, c’est surtout parce qu’ils sont persuadés qu’ils leur sont supérieurs. Aussi, pour les persuader qu’il n’est pas différent et qu’il est lui aussi supérieur à ces primitifs, le Noir rie avec eux.
Dans le chapitre consacré au Nègre et la psychopathologie, il est démontré comment lors de la projection des aventures de Tarzan, le Noir antillais s’identifie immédiatement à Tarzan. Tarzan incarne le Blanc, certes sauvage, mais beaucoup moins que les Africains qu’il lui font face. En revanche, dans une salle d’Europe, Tarzan est rejeté en tant que primitif. De même, « un documentaire sur l’Afrique, projeté dans une ville française et à Fort-de-France, provoque des réactions analogues. Mieux : nous affirmons que les Boschimans et les Zoulous déclenchent davantage l’hilarité des jeunes Antillais (…) » (22)
Le sauvage c’est l’Autre : je ne suis pas sauvage ! Ainsi, l’Autre ne peut être moi. J’établis, par conséquent, un cordon sanitaire civilisationnel entre lui et moi afin que la confusion ne s’opère pas. Je marque ma différence, assez fort pour qu’elle soit entendue par le vrai homme :
« Il est normal que l’Antillais soit négrophobe. Par l’inconscient collectif, l’Antillais a fait siens tous les archétypes de l’Européen. L’anima du nègre Antillais est presque toujours une Blanche. De même, l’animus des Antillais est toujours un Blanc (…).
Un peu plus tard, nous lisons des livres blancs et nous assimilons petit à petit les préjugés, les mythes, le folklore qui nous viennent d’Europe (…) Le noir Antillais est victime de cette imposition culturelle. Après avoir été esclave du Blanc, il s’auto-esclavagise. Le nègre est, dans toute l’acception du terme, une victime de la civilisation blanche.
Rien d’étonnant à ce que les créations artistiques des poètes antillais ne portent pas d’empreinte spécifique : ce sont des Blancs. Pour revenir à la psychopathologie, disons que le nègre vit une ambiguïté qui est extraordinairement névrotique. À vingt ans, c’est-à-dire au moment où l’inconscient collectif est plus ou moins perdu, ou du moins difficile à ramener au niveau du conscient, l’Antillais s’aperçoit qu’il vit dans l’erreur. Pourquoi cela ? Tout simplement parce que, et ceci est très important, l’Antillais s’est connu comme nègre, mais, par un glissement éthique, il s’est aperçu ( inconscient collectif ) qu’on était nègre dans la mesure où l’on était mauvais, veule, méchant, instinctif. Tout ce qui s’opposait à ces manières d’être était blanc.
Le Procureur Fanon ?
À sa sortie, Peau noire et masques blancs offusqua le milieu littéraire. Il se permettait de dire des choses fortes à une époque où l’on ne s’était pas encore habitué à entendre un Noir faire autre chose que danser avec une jupe faite de bananes. Frantz Fanon a aussi déclenché la colère de certaines « féministes » à cause de son deuxième chapitre : La femme de couleur et le Blanc, et plus particulièrement les pages concernant « Mayotte Capécia ». On va vite comprendre pourquoi.
Dès les premières pages, il expose « dans quelle mesure l’amour authentique demeurera impossible » entre la femme de couleur et l’Européen « tant que ne seront pas expulsés ce sentiment d’infériorité ou cette exaltation adlerienne (…) » (24). Car l’amour - le vrai, pas la sublimation d’un fantasme qui déifie le sociétaire d’une « race » jugée supérieure à la sienne -, celui qui se fonde sur le principe de « vouloir pour les autres ce que l’on postule pour soi, quand cette postulation intègre des valeurs permanentes de la réalité humaine » (25), doit commencer par se libérer « des conflits inconscients » (26)
Il n’y a donc pas d’amour réel possible tant que le sentiment d’infériorité du Noir vis-à-vis du Blanc ne sera pas débusqué - l' inverse est tout aussi vrai. Ce contrat entre l’ amoureux et son amante, n’ étant pas respecté, seule la désillusion pointera le bout de son nez en fin de parcours.
Et c’ est à ce moment précis qu’ arrive la cas « Mayotte Capécia ». Le nom de cette écrivaine martiniquaise est devenu synonyme de l’ aliénation du Noir et de son complexe d’ infériorité grâce, ou à cause, de la « machine à broyer » Fanon.
Beaucoup de personnes se sont plaintes de la dureté du jugement de Fanon alors qu’ au fond il n’ évoque « Mayotte Capécia » que de la page 34 à 42. Les autres allusions parsemées tout au long de l’ ouvrage ne seront que ponctuelles. Mais le mal est fait, consommé.
Qui est donc « Mayotte Capécia » ? Cette martiniquaise (27) était devenue la coqueluche d’ un certain milieu littéraire parisien après la publication de son roman autobiographique, baptisé « Je suis martiniquaise », en 1948. Selon Fanon, ce roman autobiographique confortait, à lui seul, les clichés les plus avilissants concernant le complexe d’ infériorité du Noir et son désir de lactification - blanchir sa race.
Il faut voir là l’origine de la négrophobie de l’Antillais. Dans l’inconscient collectif, noir = laid, péché, ténèbres, immoral. Autrement dit : est nègre celui qui est immoral. Si dans ma vie je me comporte en homme moral, je ne suis point un nègre. D’où, en Martinique, l’habitude de dire d’un mauvais Blanc qu’il a une âme de nègre (…) » (23)
Frantz Fanon ne se ment pas. Il ne triche pas avec lui-même. Il admet qu’il a lui aussi été victime de l’imposition culturelle et livre sa honte sur certains de ses comportements téléguidés par la culture dominante.
Fanon ne vise à rien d’autre qu’ à la désaliénation du Noir…autant que celle du Blanc. C’est le but ultime :
« Il est de bon ton de faire précéder un ouvrage de psychologie d’un point de vue méthodologique. Nous faillirons à l’ usage. Nous laissons les méthodes aux botanistes et aux mathématiciens. Il y a un point où les méthodes se résorbent.
[…] Le " sauvage de la brousse" n’ est pas envisagé ici. C’est que, pour lui, certains éléments n’ont pas encore de poids.
[…] Beaucoup de nègres ne se retrouveront pas dans les lignes qui vont suivre. Pareillement beaucoup de Blancs.
Mais le fait, pour moi, de me sentir étranger au monde du schizophrène ou à celui de l’ impuissant sexuel n’ attaque en rien leur réalité.
Les attitudes que je me propose de décrire sont vraies. Je les ai retrouvées un nombre incalculable de fois.
Cet ouvrage est une étude clinique. Ceux qui s’ y reconnaîtront auront, je crois, avancé d’un pas. Je veux vraiment amener mon frère, Noir ou Blanc, à secouer le plus énergiquement la lamentable livrée édifiée par des siècles d’ incompréhension (…) » (7)
La question essentielle est posée : est-ce que le Noir est capable de dépasser son « sentiment de diminution, d’ expulser de sa vie le caractère compulsionnel qui l’ apparente tant au comportement du phobique », sachant que « chez le Nègre, il y a une exacerbation affective, une rage de se sentir petit, une incapacité à toute communion humaine qui le confine dans une insularité intolérable » (8) ?
Pour le coup, celui-ci cherche à compenser son « étouffement » en sortant de ce corps dans lequel il se sent à l’ étroit, tout en ayant le sentiment de ne pas exister aux yeux de ceux qu’il ambitionne d’ éblouir. Alors, il part à la conquête de ses « fantasmes infantiles », cherchant à les matérialiser à n’importe quel prix.
« Nous n’ aurons aucune pitié pour les anciens gouverneurs, pour les anciens missionnaires. Pour nous, celui qui adore les nègres est aussi ’’malade’’ que celui qui les exècre.
Inversement, le Noir qui veut blanchir sa race est aussi malheureux que celui qui prêche la haine du Blanc »
Dès l’ introduction de Peau noire, masques blancs, les choses sont clairement posées : « Pourquoi écrire cet ouvrage ? Personne ne m’ en a prié. Surtout pas ceux à qui il s’adresse. Alors ? Alors, calmement, je réponds qu’il y a trop d’imbéciles sur cette terre. Et puisque je le dis, il s’ agit de le prouver » (1)
On comprend vite que cet ouvrage va briser la langue de bois, commotionner monsieur Tabou, fracasser les faux-fuyants sur les relations entre le Blanc dominateur et le Noir dominé et colonisé. Car Frantz Fanon met franchement les pieds dans le plat. Il va là où d’ autres n’ auraient jamais osé s’ aventurer, trop effrayés de briser le petit confort de l’antiracisme-spectacle. Ce dernier se complait dans une posture exclusiviste posée en termes réducteurs et ne pipe mot au sujet des effets psychologiques du racisme sur les racisés de longue date.
Fanon décrit les répercussions du racisme sur les Noirs avec une précision d’ horloger suisse et un tel refus de la langue de bois que l’ on devine bien pourquoi tant de Noirs, supposés être sensibles à ce genre de combats antiracistes, préfèrent le laisser dans l’ oubli. Celui-ci dissèque toutes les pathologies qui sont nées de l’ intériorisation du racisme par les Noirs : haine de soi, complexe d’ infériorité, fascination du Blanc : « l’ infériorisation est le corrélatif indigène de la supériorisation européenne, prétend Fanon. Ayons le courage de le dire : c’ est le raciste qui créé l’ infériorisé » (2)
Il certifie que « le Noir ne peut se complaire dans son insularité », raison pour laquelle il fuit son être afin de s’approprier la seule « porte de sortie » qui l’ intéresse vraiment. Celle-ci « donne sur le monde blanc. D’ où cette préoccupation permanente d'attirer l' attention du Blanc, ce souci d' être puissant comme le Blanc, cette volonté déterminée d' acquérir les propriétés de revêtement, c' est à dire la partie d' être ou d' avoir qui entre dans la constitution d’ un moi » (3). Ils sont des hommes à peau noire qui revêtent des masques blancs.
« Le nègre esclave de son infériorité, le Blanc esclave de sa supériorité se comportent tous deux selon une ligne d’ orientation névrotique, continue-t-il. (…) Il y a chez l’homme de couleur tentative de fuir son individualité, de néantiser son être-là » (4)
Ce livre propose une réelle « interprétation psychanalytique du problème noir » qui permettra au Noir de « se libérer de l’ arsenal complexuel qui a germé au sein de la situation coloniale »(5). Il ambitionne de détruire le cycle infernal qui fait de certains Blancs des être enfermés dans leur blancheur et qui « s’ estiment supérieurs aux Noirs », pendant que de leurs côtés, des Noirs totalement possédés « veulent démontrer aux Blancs coûte que coûte la richesse de leur pensée, l’ égale puissance de leur esprit » (6)
Rejet du côté blanc et consolidation de sa supériorité supposée. Du côté noir : volonté obsessionnelle d’ exister aux yeux de celui qui le rejette puis acceptation sans rechigner du « règlement intérieur » qu’ il lui impose. Le Noir ne se contente pas d’ intérioriser la grammaire psychologique inhérente à son infériorité supposée, il y a carrément une « épidermisation » totale. Le Noir dont il est question ici est le névrosé, le pur produit du racisme occidental qui a hérité de toutes les tares que lui a enseigné le Monstre. Et, aussi « pénible que puisse être pour nous cette constatation, nous sommes obligés de la faire : pour le Noir, il n’ y a qu’un destin. Et il est blanc »
Peau noire, masques blancs est sûrement l’ œuvre de Frantz Fanon la plus caricaturée de nos jours. Et certains révolutionnaires d’extrême gauche y sont, à vrai dire, pour beaucoup.
À leurs yeux, le Fanon dénonçant les rapports de domination sur l’ « homme de couleur », n’ a pas le même intérêt que le théoricien de la révolution anti-coloniale. Il est même supposé être beaucoup moins intéressant. Grave erreur !
Peau noire, masques blancs est un ouvrage qui permet de bien prendre en compte la complexité réelle du racisme - et non de le réduire à sa portion congrue comme on le voit de nos jours grâce au fétichisme anti-lepéniste. Mais surtout, cet ouvrage permet de saisir les effets du racisme sur ses victimes à travers une analyse de leur inconscient. Car l’inconscient ne triche pas, ne ment jamais. Lorsqu’il se manifeste, alors que l’on réfute la réalité d’une névrose, l’inconscient, et corrélativement, ses effets, vous rappellent à l’ ordre dans l' instant.
Mais combien d’ antiracistes, dissertant sur le racisme dont peuvent être victimes les Noirs, ont-ils lu ce livre resté célèbre de par son seul titre ? On devine bien que peu d’entre eux s’en sont donnés la peine. On se demande d’ailleurs si certains de ceux qui s’ en réclament ne se seraient pas arrêtés qu’ à la seule lecture du titre afin de s’ attribuer une conscience « anti-aliénation » à moindre frais.
Fanon a pensé en vain, dans le vide. Ses analyses n’ ont absolument pas été prises en compte par l’ antiracisme français, alors que le racisme anti-noir existe dans ce pays et a même une origine lointaine - il y vit de plus une forte population d’origine africaine. Lorsque le paternaliste de gauche jette son dévolu sur les idées des penseurs d’ un autre monde que le sien, il ne recherche que les thématiques qui abondent dans son sens, en se désintéressant totalement du reste. Que l’ on ne feigne donc pas l’ étonnement face à ce comportement.
« L’ on nous dira, oubliant en cela notre but, que nous aurions pu porter notre attention ailleurs, qu’ il existe des Blancs n’entrant pas dans notre description.
Nous répondrons à ces objecteurs que nous faisons ici le procès des mystifiés et des mystificateurs, des aliénés, et que, s’ il existe des Blancs à se comporter sainement en face d’un Noir, c’ est justement le cas que nous n’avons pas à retenir. Ce n’ est pas parce que le foie de mon malade fonctionne bien que je dirai : les reins sont sains. Le foie étant reconnu normal, je l’ abandonne à sa normalité, qui est normale, et je me tourne vers les reins ; en l’ occurrence, les reins sont malades. Ce qui veut qu’ à côté de gens normaux qui se comportent sainement selon une psychologie humaine, il en est à se comporter pathologiquement selon une psychologie inhumaine. Et il se trouve que l’ existence de ce genre d’hommes a déterminé un certain nombre de réalité à la liquidation desquelles nous voulons contribuer ici »
Toujours avant l’ explosion de Fanon, c’est l’ universitaire martiniquais, Louis Thomas Achille, qui s’ interrogera, en 1949, sur les réelles motivations de certains mariages blancs/noirs et en tirera des conclusions pas très éloignées de celles de Frantz Fanon :
« Pour ce qui est du mariage proprement inter-racial, on peut se demander dans quelle mesure il n’ est pas quelquefois pour le conjoint coloré une sorte de consécration subjective de l’ extermination en lui-même et à ses propres yeux du préjugé de couleur dont il a longtemps souffert. Il serait intéressant d’ étudier cela dans un certain nombre de cas et peut-être de chercher dans ce mobile confus la raison de certains mariages inter-raciaux réalisés en dehors des conditions normales des ménages heureux. Certains hommes ou certaines femmes épousent en effet dans une autre race des personnes d’ une condition ou d’ une culture inférieures à la leur, qu’ ils n’ auraient pas souhaitées comme conjoints dans leur propre race et dont le principal atout semble être une garantie de dépaysement et de " déracialisation "( l’horrible mot ) pour le conjoint. Chez certaines personnes de couleur, le fait d’épouser une personne de race blanche semble avoir primé sur toute autre considération. Elles y trouvent l’ accession à une égalité totale avec cette race illustre, maîtresse du monde, dominatrice des peuples de couleur » (52)
Fanon apprit après discussion avec quelques Antillais que « le souci le plus constant de ceux qui arrivaient en France étaient de coucher avec une Blanche [et] à peine au Havre, ils se dirigent vers les maisons closes » (53). C’ est, affirme-t-il, un « rite d’ initiation à l’ authentique virilité » à leurs yeux.
Pourtant, dira-t-il, « il faut que ce mythe sexuel - recherche de la chair blanche - ne vienne plus, transité par des consciences aliénées, gêner une compréhension active » (54). Il est loin de penser que 50 ans plus tard, la conscience aliénée continue à faire son travail de sape en réduisant très souvent les engagements constitutifs de l’ antiracisme aux « impératifs de chair blanche », le tout déguisé en dialectique de l’ ouverture à l’Autre. Il suffit de lire l’ œuvre de Calixthe Beyala ou, plus récemment, le dernier roman d’ Élisabeth Tchoungui pour comprendre sa portée réelle.
C'est l'antiracisme-spectacle qui définit les modalités de ce qu'il est « bien et bon de penser » pour qu’ensuite, tous les wannabe cherchant à être les mascottes de l'opinion - et à être adoptés puis consacrés par elle au nom d'une conformité avec les valeurs dominanntes -, s'engouffrent dans la dialectique du métissage, sans même la maîtriser, et se permettent de tenir des raisonnements péremptoires qui sont consubstantiels à ce qu'ils prétendent rejeter. On n'entend jamais autant parler de race que lorsque ceux qui affectent de démontrer qu'ils en rejettent le principe ouvrent la bouche : aucun raisonnement digne de ce nom et tout se ramène soit à la race, soit à la distance raciale de leur couple. Le paternalisme intrusif prend les Noirs pour des grands enfants qui ne réfléchissent pas plus loin que le bout de leur nez et qui sont habitués à traiter leurs problèmes avec mépris en expédiant le débat au motif que le métissage règle le problème. Et pour ce faire, d'aucuns font état d'un mimétisme servile nauséux pour bien démontrer qu'ils sont sur la même longueur d'ondes et qu'ils partagent les mêmes valeurs.
L’ inverse existe tout autant : de pseudo-antiracistes blancs confisquant puis indexant l’ antiracisme et les luttes pour la dignité exclusivement par rapport à leurs seuls intérêts, basés sur ces mêmes impératifs de chair. Dans les deux cas, l’ Autre est d’abord un objet de jouissance dont on cherche à faire la conquête pour la satisfaction pleine, immédiate et sans entrave de ses seuls désirs. Et c’ est là, comme lors d’ un tour de magie, que la vigilance des personnes en passe d’ être mystifiées ne doit pas se relâcher : l’ on dilue cet égoïsme à courte vue dans des idées généreuses afin que les qualités de ces idées [ qui ne font pas débat et que personne ne remet en cause sauf lorsqu’elles sont, comme ici, instrumentalisées à d’ autres fins ; à ce moment précis, elles perdent leur statut de neutralité et relèvent de l’ idéologie pure ] masquent les travers non-assumés des vraies motivations personnelles.
C’ est Jules César qui veut faire la conquête de la Gaule uniquement pour flatter son ego démesuré et sa folie des grandeurs. Alors il crie à la résistance gauloise : vous n’empêcherez pas nos peuples de se mélanger. Pardon ? Oui ! il est dans une conquête banale et triviale mais il utilise une métaphore affective, ce pathos qui va rogner les dernières résistances des naïfs et donner du sens à une subjectivité qu'il n'assume pas pleinement.
De nos jours, le château-fort du métissage est pris d'assaut par des hurluberlus sans consistance qui cherchent à s'inventer une ouverture sur le monde, pontifiant à tout bout de champ sur des forums, newsgroups et autre skyblogs. Depuis quand l'ouverture se juge à l'aune de la distance raciale ethnique et culturelle entre deux personnes ? Bruno Gollnisch serait donc plus ouvert que Richard Bohringer parce que sa femme est japonaise ? Les bas instincts triomphent : incapables de s’en libérer ou de les assumer comme des personnes adultes et responsables, le mystifié et le mystificateur les transfèrent sur des nobles combats ou valeurs - antiracisme, universalisme etc. Pourquoi ce besoin impérieux de se construire une morale abnégative en niant une réalité partagée universellement ? Sans doute pour se distinguer des autres aux yeux de l'opinion et la convaincre qu'ils doivent être perçus autrement.
D’un coup, le métissage devient l' instrument symbolisant la négation de leur désir puisqu’il prend en charge tout ce qui n’est pas assumé : ma femme est noire ? C’est parce que je suis pour le métissage.
Le métissage est un fait universel qui appartient à l'histoire de l'humanité, et ce depuis la nuit des temps. Il n’appartient pas à ces petites coteries d’apprentis sorciers imbus d'eux-mêmes débarquées de la dernière pluie qui en parlent comme s'ils en étaient les uniques propriétaires. Le tout teinté d'un élitisme malsain, fondé exclusivement sur une indexation raciale, où ils se voient comme des pères-fondateurs préfigurant une concorde pan-raciale symbolisée par leur couple qui en serait le dénonateur. Le délire de nos jours se traite très bien dans certains hopitaux parisiens et l'on ne saurait que trop conseiller à certains de consulter le plus rapidement possible avant qu'ils ne nous annoncent qu'ils peuvent marcher sur l'eau ou ouvrir la mer en deux.
Le désir qui sous-tend toute relation est refoulé car, moralement, il est peu rentable sur le plan symbolique et l' on éprouve plus de satisfaction à flatter son orgueil en plaçant ses choix amoureux, non pas sous le giron du désir de l'autre, mais sous celui de l'ouverture à l'autre, donc sous le patronage d'une déontologie morale qui sacrifierait la satisfaction d' aspirations personnelles pour le bien d'un idéal commun d‘ordre moral. Or cette posture, devant laquelle tout le monde se pâme, est une fumisterie sans nom car, au vrai, il n'y a guère d'ouverture vers l'autre lorsque l'on sublime ses envies. Entendre une « beurette » dire qu'elle est « ouverte et tolérante » parce qu'elle aime les « Blacks » au point d'en avoir épouser un, est une sombre crétinerie et de la démagogie à l'état pur qui équivaut à dire qu'un homme chauve est ouvert parce qu'il aime les blondes aux yeux bleus à forte poitrine. Il n’y a absolument aucune réalité d’ordre morale dans aucun des deux cas mais une logique qui se nomme "consommation du désir". Le désir n'est pas de la morale et lorsque celui-ci sous-tend un choix, préférentiel ou non, il interdit par la même occasion l'accès à toute cette grammaire ampoulée qui confond "distance raciale entre deux individus" et "morale". C'est là l'une des tares de l'antiracisme-spectacle qui, n'apprenant que la scansion de slogans, en n'oublie l'essentiel : la conscience ne se fond ni ne se confond avec les désirs.
Il serait amusant de répertorier le nombre hallucinant de sophismes que l'on peut entendre sur ce sujet de la part des apologistes du métissage. Mais la place manque ici. Plus amusant encore serait de relever le nombre d'occurrences fondées sur le centrisme racial - tout ramener à la race. Calixthe Beyala - oui encore elle mais on aurait pu prendre Patrick Karam du Collectif Dom qui expliquait à peu de chose près la même chose sur les couples mixtes dans le débat ayant suivi le reportage Noires mémoires - dénonce le racisme et dans le même temps définit le fruit d'une relation « interraciale » comme étant porteur de spécificité biologique propre à éradiquer le racisme. On l'a lue et entendue plusieurs fois affirmer que c'est grâce au métissage que le racisme va décliner.
Or il est intéressant de noter qu'il y a là une contradiction absolue dans cette double posture : prêter des qualités morales à des individus sur la seule base de leur origine biologique constitue le fondement même de ce que l'on a appelé le « déterminisme biologique ». Le déterminisme biologique fut le fondement du racisme scientifique et postulait que le paramètre biologique prédominait sur le domaine de l’esprit et de l’expérience et qu’il est du ressort du biologique de déterminer les aptitudes, les inaptitudes, la morale etc. des groupes humains : chaque race avait des qualités et des défauts en propre, innés.
Les croisements « racio-biologiques » n'engendrent pas de géne de la tolérance ou de l'ouverture d'esprit. Dire : « je suis un métis et je suis tolérant de par ce mélange » n’est qu’un sophisme aussi bête que de dire « j’ai les yeux bleus et je fais bien du vélo ». Le gène des yeux bleus ne prédispose pas à savoir faire du vélo : faire du vélo s’apprend. De la même manière, être ouvert et tolérant s'apprend. Un référent biologique ne peut donc pas servir à quantifier la morale, la culture ou les aptitudes des individus sans présupposer l’acceptation d’une vision raciste et essentialisée des individus enfermés dans une pseudo nature qui lierait race et aptitude.
Les seuls caractères qui découlent de l'inné sont physiques et ce sont ceux que les ancêtres transmettent par les gènes. Cette transmission de gènes détermine les particularités physiques de chacun : la couleur de peau, des yeux et la texture des cheveux, notamment. Tout le reste relève de l'acquis, donc de la pédagogie, de l'éducation, de la conquête, des valeurs que transfèrent les tuteurs à leur descendance et que cette descendance assimilera plus ou moins bien selon ses capacités propres décorrélées du substrat racial. C'est le cas de l'antiracisme, de l'humanisme, de la droiture, de la morale etc.
La constitution des valeurs morales ne relève absolument pas de l’hérédité et du biologique mais bien de l’acquis et, par conséquent, c’est une donnée universelle intégrable aussi bien par un Chinois, un Norvégien ou un Bolivien. La race ne joue aucun rôle dans le domaine des valeurs morales puisque la morale se rapporte à l’acquis et non à l'inné. Un Bolivien peut être parfaitement universaliste et ouvert sur le monde sans que sa race supposée soit un frein, un préalable ou un critère de validité. L'éducation transmise par ses parents et la manière dont il assimilera ce tout suffisent amplement à y parvenir. Venir introduire un élément de validation qui serait d'ordre racial est tout simplement dément. Ce n'est pas la race ou le degré de sang différent dans ses veines qui sanctionne son humanisme mais la somme de cette faculté qu'a chaque individu à consacrer la valeur de la personne humaine en plaçant celle-ci au-dessus de tout.
La thèse de Calixthe Beyala n’est pas antiraciste sur un iota. C'est de l'aristocratisme racial dont on accepte l'expression puisqu'elle ne présente aucun danger pour l'idéologie dominante et se propose même de caricaturer de manière éhontée des réalités bien plus complexes - que l'antiracisme refuse de prendre en charge d'ailleurs. Sa thèse est non seulement stupide mais pis encore elle ne constitue rien d’autre qu'une déclinaison bas de gamme d’un concept raciste éculé qui veut que ce soit la « race » qui définisse la propension à l’ouverture.
Et si l’on voulait aller encore plus loin il faudrait aussi évoquer la différence entre « race » ( inné) et culture ( acquis ) et l’on en finirait avec cet « aristocratisme racial » confusionniste qui a la prétention de se substituer à une conscience du réel en mélangeant tout. Nous voyons là les limites de l'autosatisfaction de gens moins préoccupés par la réflexion portée sur ce qu'ils théorisent pour épater la galerie que sur les retombées jubilatoires dont ils vont pouvoir bénéficier aux yeux de l'opinion. Au nom du métissage on entend tout et surtout n’importe quoi. Et remarquable est la propension qu’ont les gens à dire des âneries dans une athmosphère ultra-permissive qui en dit long sur la mysification. Ainsi, ceux qui professsent le rejet du centrisme racial - une fois qu'ils l'ont dit de manière ostentatoire - passent leur reste de leur temps à pratiquer ce qu'ils rejettent chez autrui, c'est à dire qu'ils considèrent tout individu réductible qu'à sa race, sa biologie. Les essentialistes imbéciles qui prônent le métissage comme idéologie obligatoire et exclusive à laquelle tout se ramène sont les pires dans ce domaine. L'autosatisfaction les enivre tant qu'ils ne se rendent même pas compte de la nature de leur propos.
Sommes-nous d'accord pour dire qu'il y a une tendance à faire passer cet arsenal complexuel hérité du racisme pour de la « tolérance » dans certains cas ? Dans le cadre de la lutte contre le racisme, le prétendu antiraciste qui s' affaire à étudier la négrophobie doit être en mesure de traiter tous les aspects de cette négrophobie, ainsi que ses conséquences pour être crédible. Pas seulement le racisme radical, mais toutes les subdivisions, dont celles du volet psychologique que Frantz Fanon nomme l‘ « arsenal complexuel ». Il est donc primordial d’ être en mesure de faire son propre examen de conscience et de mettre de côté son orgueil surdimensionné d’ antiraciste qui s’imagine qu’il est suffisant d’avoir une femme blanche quand on est noir pour élucubrer de manière pédante sur des questions sérieuses alors que les 9/10 ème de ceux que l’on entend sont tout simplement de fieffés incompétents.
Fanon Frantz, cet esprit radical refusant la langue de bois, était marié à une femme…toute blanche. Trahit-il sa pensée pour autant ? Non car sa pensée dépassait ses désirs et participait d’ une réalité d’ ordre supérieur à la simple envie de l’ Autre. Il n’ opérait pas de confusion entre conscience et désir en faisant l'apologie de ses désirs travestis sous le masque de la tolérance et du métissage. Il ne subordonnait pas sa conscience à ses fantasmes car sa conscience EST. Il n' exigeait pas, comme les Médiocres dont il est question plus haut, une refonte du champ d'intellection de la critique contre le racisme afin de protéger son attirance pour une femme accidentellement blanche. Espérons qu' un jour, on osera parler avec autant de franchise de ces cyniques qui cultivent certains stéréotypes sans se soucier du fait qu' ils communiquent, à dessein, sur la couleur de peau de leur femme, de leur mari, de leurs enfants, de leur chien ou de leurs bottes afin de court-circuiter les éventuels soupçons de racisme - comme si tout ceci constituait une preuve de non-racisme. Espérons que l' on se penchera aussi, et sans fausse pudeur, sur le lobbying éhonté qu’ ils exercent en jouant du « pathos à thématique raciale » afin de faire en sorte que tout un pan de l' arsenal complexuel hérité du racisme se soustrait automatiquement à l' analyse critique.
L’ antiracisme n’a pas vocation à prendre en charge les fantasmes et les divagations des tombés en enfance. Il se voit pourtant détourner de son objectif originel pour pallier à l’ immaturité, l’ inconséquence et le manque de courage intellectuel de ceux-ci. Il existe pourtant une solution simple qui serait d’ assumer la nature intrinsèquement égoïste de l’amour - et qu’ il soit sincère ou calculé ne change rien au problème. En reconnaissant cette nature, il deviendrait utile pour certains démagogues de ficher la paix à l’ antiracisme et d’ arrêter de le prendre en otage afin de mieux apaiser leur conscience. Le commun n’ a pas à être sacrifié sous l’ autel du particulier, qui lui, de toute manière, se doit de rester dans la sphère privée. Est-ce un rêve ? Sans doute…
Non, décidément, on n’ est pas sorti de l’ auberge ! D’ ailleurs, ce n’ est même plus une auberge, mais un bunker.
Tout le monde sait qu’ il n’ y a pas plus noir qu’un Noir pauvre. Lorsqu’ il devient riche, célèbre et adulé par la majorité blanche d’un pays, celui-ci prend de la valeur, sa cote augmente au prorata de son aura auprès de l’ opinion. Il n’ est plus « le Noir » mais devient un nom. Le comique Mouss Diouf a parfaitement retranscrit ce précepte dans le titre d’un de ses spectacles intitulé « Avant, quand j’ étais noir ». Histoire vraie : nous connaissions des Noirs qui, à l’époque où les top models commençaient à émerger dans la presse féminine, dans les années 90, ne juraient que par les Cindy Crawford et autres Claudia Schiffer. La blonde ou la brune, les femmes incarnant la beauté parfaite. Une Naomi Campbell accouchait d’ une fin de non-recevoir de ceux qui ne voyaient de beauté que chez la blonde ou la brune et ne discernaient aucun attrait physique chez elle. Jusqu’ à ce qu’ elle commence à entrer, elle aussi, dans le catalogue des fantasmes d’ une bonne partie des hommes blancs du monde occidental. Sa cote grimpa, on commença à parler d’elle et, du coup, ces Noirs du groupe « Naomi Campbell ? Non merci », l’ intégrèrent naturellement dans le répertoire de leurs désirs. Ils se mirent soudainement à la trouver ravissante et désirable. Le monde civilisé, le seul, l’ unique avait donné son assentiment. On la découvrait belle et attirante et l’ on pouvait, dès lors, sans honte et sans l’ impression de trouver un penchant pour une fille au rabais, s’ imaginer sans mal être le petit ami de Naomi Campbell sans avoir à rougir. S’ imaginer pouvoir être son petit ami c’ est pouvoir obtenir l’ « objet » que le Blanc désire, donc se faire envier de lui et exister dans son regard. Être estimé. Être à sa hauteur. Avoir les mêmes goûts. En jiu-jitsu, les maîtres en la matière sont les Brésiliens : ils ont les meilleurs combattants, les meilleurs élèves et les meilleures écoles au monde. Aussi, pour tout pratiquant français, avoir la reconnaissance de ces enseignants dans cet art n’a aucune commune mesure avec la reconnaissance des maîtres luxembourgeois ou slovaques, par exemple. Non que ces derniers ne valent rien mais l’ on désire toujours briller aux yeux de ce qui se fait de mieux dans le domaine concerné.
Au niveau esthétique, on en revient souvent au même constat : le nec plus ultra demeure l’ Occidental et tant que celui-ci n’a pas donné son aval…
Plus proche de nous, on a vu Houcine, ex-membre de la Star Academy, répondre à une question posée sur le type de filles qui le faisait craquer : « J’ aime tous les genres de filles. Je les aime belles. Mais par contre, les Blacks impossible. Je ne l’ai jamais fait avec une black, et pas question que je le fasse » (55). Houcine est noir mais n’ aime pas les filles noires au point où il n’est pas question qu’ il passe à l’ acte avec elles. Bien. On connaît des gens bien plus futés que lui qui pensent la même chose mais qui savent aussi qu’ ils ne sont pas obligés de le dire avec autant de vulgarité et de mépris. Et l’ on imagine à peine le tsunami médiatique qui aurait été créé si Houcine avait été blanc.
En lisant le reste de l’ interview, remplie de stéréotypes en rapport à la sexualité hors-pairs du Noir, on saisit clairement qui sont les filles visées dans cette célébration de la puissance du mâle noir. Inutile d’ en rajouter plus. Mais l’ on remarquera une fois de plus que pour justifier ses penchants, on se doit d’abord de détruire ce que l’ on est ou ce qui nous ressemble. Une constante chez les Noirs. Oui, le nombre de Noirs qui crachent leurs glaires sur d’ autres Noirs afin de ne pas avoir à admettre qu’ ils ont une très large préférence pour les Blanches est fascinant. Il serait en revanche intéressant de savoir si Houcine ne courrait pas comme un damné en oubliant tout ce qu’ il a dit précédemment dans le cas où Naomi Campbell ou Beyonce lui proposeraient une date. Car il y a gros à jouer : c’ est l’ assurance de faire les gros titres de la presse, d’ être envié, admiré et jalousé, d’ entrer dans le club des mondains connus et glorifiés, uniquement parce qu’ ils couchent avec des pipeules. Il faudrait que Houcine pense à tous ces avantages. On est jamais trop prudent. Mais peut-être, n’ est-ce pas son genre de chercher à exister dans le regard de l’ autre ? À lire son interview, on a du mal à le croire…
Plus violent encore, une scène que l’ universitaire français René Etiemble, narrera . Naïvement, il assimila une de ses amies d’enfance à une « négresse ». L’hystérique, prise dans les affres de sa négrophobie, éructa : « Moi ? Une négresse ? Ne vois-tu pas que je suis presque blanche ? Je déteste les nègres. Ils puent, les nègres? Ils sont sales, paresseux. Ne me parle jamais de nègres » (56) Car pour se permettre de haïr les Noirs, les inconséquents négrophobes noirs doivent d’ abord se persuader qu’ ils ne le sont pas eux-mêmes. Haïr des individus qui peuvent être « soi » n’ a aucun sens quand « soi » et « eux » peuvent ne faire qu’ un. Ils n’ auront d’ autres choix que de faire état d’ une altérité irréductible au concept de « négrité », puisque l’ évoquer, c’ est admettre l’ existence de ceux qui la compose : les nègres. D’ où le je ne suis pas nègre. Car un nègre, c’ est autre chose.
Ce differentialisme racial brandit avec force, va donc les projeter dans un univers où l’ expression de leur haine est supposée « cohérente ». Ne pas être noir, c’est ne pas être un sauvage. Ne pas être sauvage, c’ est, par conséquent, être plus proche du Blanc que lui-même ne le croit. Et surtout être très éloigné du vrai sauvage… le nègre, justement. On va donc tenter de convaincre le Blanc. Le persuader que lorsqu’ il les voit, il ne doit pas s’ attarder sur cette calamité chromatique qui fonde leur honte, leur dégoût et jusqu’ à leur haine. Une fois ce stratagème réalisé, on va enfin pouvoir « rationaliser » sa haine et se mettre à vomir le nègre de toutes ses forces.
L’ hystérique criant sa haine du nègre il y a près de 60 ans, existe malheureusement encore. Nous l’ avons retrouvée il y a quelques années dans un reportage de Zone Interdite sur M6, un dimanche soir, sous les traits d’ une Marseillaise. Suite à une sombre affaire d’ accusation de viol, celle-ci vociféra lors de la confrontation avec son agresseur supposé qu’ elle ne pouvait qu’ avoir été violée par lui puisqu’ elle ne fréquente jamais les Noirs. Elle beugla : « Noooooooooooon !!! je sors pas avec des Noirs, c’est des sauvages !! ». Sauvages, nous y revoilà ! Le mot n’ est décidément pas mort. Il vit encore et se porte comme un charme.
Reprenons : a-t-elle voulu coucher avec le présumé violeur comorien qui affirme qu’elle était consentante ? Impossible, jure-t-elle ! Pourquoi ? Elle déteste les nègres et ne sort jamais avec eux car ce sont des sauvages. Le problème est donc réglé. Il y a une incompatibilité dans le degré de civilisation entre le présumé violeur et la victime, tous deux Noirs et comoriens : une civilisée ne fréquente pas des sauvages.
Mais l’ aliénation ne s’ arrête pas là et va plus loin dans cette sottise qui la pousse à s’ échapper du monde sauvage pour rejoindre le monde civilisé : « (…) je rapporte un fait, écrit Frantz Fanon, qui est pour le moins comique : dernièrement, je m’ entretenais avec un Martiniquais qui m’ apprit, courroucé, que certains Guadeloupéens se faisaient passer pour nôtres. Mais, ajoutait-il, on s’ aperçoit rapidement de l’ erreur, ils sont plus sauvages que nous ; entendez encore : ils sont plus éloigné du Blanc » (57)
On est toujours le sauvage de quelqu’ un qui se croit plus civilisé, donc moins nègre…
« Il y a de cela une dizaine d’années, nous fûmes étonnés de constater que les Nord-Africains détestaient les hommes de couleur. Il nous était vraiment impossible d’ entrer en contact avec les indigènes. Nous avons laissé l’ Afrique à la destination de la France, sans avoir compris la raison de cette animosité […]. Nous avons dit que quelques faits nous avaient surpris. Chaque fois qu’ il y a un mouvement insurrectionnel, l’ autorité militaire ne mettait en ligne que des soldats de couleur. Ce sont " des peuples de couleur " qui réduisaient à néant les tentatives de libération d’ autres "peuples de couleur ", preuve qu’ il n’ y avait pas lieu d’ universaliser le processus […] »
Frantz Fanon
Dans le chapitre intitulé L’ expérience vécue du Noir, Frantz Fanon lâche la narration à la première personne du pluriel pour adopter celle à la première personne du singulier. Le je remplace ainsi le nous qu ’il utilisait abondamment jusqu’ ici. Il narre dans ce chapitre sa propre expérience d’ Antillais noir débarquant en France - c’ est ainsi qu’ il désigne lui-même la métropole - et qui se voit confronté au racisme, à l’ évitement et au regard méprisant des autochtones. Il admet que « tant que le Noir sera chez lui, il n’aura pas, sauf à l’occasion de petites luttes intestines, à éprouver son être pour autrui » (58) En revanche, s’il « s’ expatrie », la force du préjugé le rattrapera. Car même s’ il n’ a plus à être noir, le Noir se doit de « l’ être en face du Blanc ». Le plus dur restant à « affronter le regard blanc », ce regard lourd et pesant. Une « lourdeur inaccoutumée [ issue ] d’ un monde qui dispute [au Noir] sa part » (59)
« " Maman, regarde le nègre, j’ai peur ! ". Peur ! Peur ! Voilà qu’on se mettait à me craindre. Je voulus m’ amuser jusqu’ à m’ étouffer, mais cela m’ était devenu impossible (…). Dans le train, au lieu d’ une, on me laissait deux, trois places. Déjà je ne m’ amusais plus. Je ne découvrais point de coordonnées fébriles du monde. J’ existais en triple : j’ occupais de la place. J’ allais à l’ autre… et l’ autre évanescent, hostile mais non opaque, transparent, absent, disparaissait. La nausée…
J’ étais tout à la fois responsable de mon corps, responsable de ma race, de mes ancêtres. Je promenai sur moi un regard objectif, découvris ma noirceur, mes caractères ethniques, - et me défoncèrent les tympans l’ anthropophagie, l’ arriération mentale, le fétichisme, les tares raciales, les négriers, et surtout , et surtout : " Y’ a bon banania "» (60)
Y’ a bon banania, c’ est la figure du tirailleur sénégalais sympathique. Enfin, sympathique si l’ on veut. Car plus que sa participation aux deux guerres mondiales, les soldats indigènes faisaient la basse besogne de la France aux quatre coins de l’ Empire colonial et dans le monde entier. Les tirailleurs algériens, et d’ autres, étaient présents durant la guerre de Crimée en 1854, durant la campagne du Sénégal en 1861 et celle de Madagascar en 1895, les expéditions militaires au Tonkin, en Chine, au Mexique, au Maroc etc. Les tirailleurs sénégalais ont, par exemple, été utilisés durant la conquête d’une grande partie de l’ Afrique Occidentale Française ( AOF ). Lors des massacres de l’ armée française à Madagascar en 1947, les tirailleurs sénégalais étaient, là aussi, en nombre. Qu ’ils soient vietnamiens, Gabonais, Algériens, Tunisiens, Marocains, c’ étaient de « bons soldats » dociles et obéissants.
Mais avant d’ être le Y’ a bon banania, le nègre était d’abord le sauvage sanguinaire. Celui qui n’ avait pas de culture, de civilisation, bête entre les bêtes. Il était la risée de l’ Europe blanche : « Lessive de la ménagère : elle blanchirait un nègre » (61) annonçait une affiche publicitaire française en 1895. Le Noir est agressif, paresseux, bestial, laid. Il fait peur, il a un sexe énorme. Il mange, dort et le reste de son temps est consacré à la fornication. Mais surtout, il est le barbare qui mange ses semblables.
C’ est la star de la pub ethnique devant tous les autres indigènes de l’ Empire français. Cette suprématie ne souffre d’ aucune contestation : he’ s the man.
Jusqu’ ici, le Noir avait la plus mauvaise place dans l’ imaginaire occidental, comme on l’ a vu. Puis, quand la guerre 14-18 se profile et éclate, l’ image du Noir se civilise soudainement. Il faut désormais montrer la bravoure et l’ abnégation du tirailleur pour les idéaux de la France afin d’ encourager les Français blancs à incorporer l’ armée. Dans le même élan, on diabolise le sale boche, l’ Allemand. Celui-ci prend tout d’ un coup la place du sauvage allouée au nègre depuis toujours. Des cartes postales de propagande sont éditées et elles montrent des prisonniers allemands gardés par un tirailleur. Et le Nègre qui les surveille, interpelle des Français transformés en visiteurs : « Ti viens voir li sauvages ! » (sic). C’est l’ image des zoos humains renversée : ce sont des sous-citoyens noirs de l’ Empire qui considèrent les Allemands comme des sauvages. Ce qui correspond d’ ailleurs exactement à la propagande faite par les autorités françaises pour cultiver la haine de l’allemand.
« " Regarde le nègre !…Maman, un nègre !…Chut ! Il va se fâcher …Ne faites pas attention, monsieur, il ne sait pas que vous êtes aussi civilisé que nous " […]
Le nègre est une bête, persiste Frantz Fanon, le nègre est mauvais, le nègre est méchant, le nègre est laid ; tiens un nègre, il fait froid, le nègre tremble, le nègre tremble parce qu’ il a froid, le petit garçon tremble parce qu’ il a peur du nègre, le nègre tremble de froid, ce froid qui vous tord les os, le beau petit garçon tremble parce qu’il croit que le nègre tremble de rage, le petit garçon blanc se jette dans les bras de sa mère : maman, le nègre va me manger » (62)
Fanon découvre véritablement sa couleur noire en France. Couleur qu’ il n’avait pas « vue » jusqu’ ici. Cette « livrée », qu’ il distingue clairement en France à travers le regard du Blanc, lui donne envie d’ exploser de colère. « Le beau nègre vous emmerde, madame », finit-il par lâcher à l’ attention d’ une femme qui évoquait « le beau nègre » qu’ il est. Assez ! Voilà l’ expulsion salvatrice :
« Alors que j’ oubliais, pardonnais et ne désirais qu’ aimer, poursuit-il, on me renvoyait comme une gifle, en plein visage, mon message. Le monde blanc, seul honnête, me refusait toute participation. D’ un homme on exigeait une conduite d’homme. De moi, une conduite de nègre. Je hélais le monde et le monde m’ amputait de mon enthousiasme. On me demandait de me confiner, de me rétrécir. […] Comment ? Alors que moi j’ avais toutes les raisons de haïr, détester, on me rejetait ? Alors que j’ aurais dû être supplié, sollicité, on me refusait toute reconnaissance ? » (63)
On sent une réelle déception de ne pas être considéré comme un simple homme. Et, le fait que cette volonté d’ aller vers l’ Autre ait été constamment rejetée, l’ afflige totalement. Cette attitude paraît assez surprenante quand on sait tout ce qui a été dit et écrit sur les Noirs en France. Qu’ attendait-il dans cette France ? Du respect ? Il décida derechef de s’ « affirmer en tant que Noir. Puisque l’ autre hésitait à [le] reconnaître (…) » (64)
Le Noir n’ est pas, à l’ instar du Juif, « l’esclave de " l’ idée " que les autres ont de [lui], mais de [son] apparaître » (65). Impossible de se fondre dans la masse, de disparaître, de cacher ce qui le distingue des Autres. Le Noir est un contenant et non un contenu. Videz-le de sa sève idéologique ou de ses croyances religieuses et il demeurera ce qu’ il est. Qu’ il change ce qui le détermine du point de vue de ses préférences sexuelles ou qu’ il grimpe tout en haut de l’ échelle sociale, il demeure un nègre aux yeux des autres. Son enveloppe chromatique en fait un inassimilable. Il n’ est pas cannibale ? Sa peau lui rappelle qu’ il en fut sans doute un à une époque. Il est diplômé de lettres ? Sa livrée lance un signal diamétralement opposé à l’ observateur qui le scrute dans la rue : Tiens un arriéré de nègre…et pardon pour le pléonasme.
« La honte, écrit Fanon. La honte et le mépris de moi-même. La nausée. Quand on m’aime, on me dit que c’ est malgré ma couleur. Quand on me déteste, on ajoute que ce n’ est pas à cause de ma couleur…Ici ou là, je suis prisonnier du cercle infernal.
Je me détourne de ces scrutateurs de l’ avant-déluge et je m’ agrippe à mes frères, nègres comme moi. Horreur, ils me rejettent. Eux sont presque blancs. Et puis ils vont épouser une Blanche. Ils auront des enfants légèrement bruns…Qui sait, petit à petit, peut-être » (66)
Frantz Fanon vit ainsi le mépris de soi qu’ il dénoncera plus tard. Déjà à cette époque, l’ argument des optimistes béats marchait à plein pot : on lui murmura au sujet des préjugés de couleur qu’ il « fallait en espérer une rapide disparition ». Mais la négrophobie est tenace. Tout le monde sait que ce qui est rapide pour l’ acceptation de l’ Autre l’ est beaucoup moins quand cet Autre est noir. 60 ans plus tard, l’ on polémique encore sur la diversité ethnique des écrans de télévision et la discrimination généralisée dans la société. Et l’ on nous dit encore que le préjugé de couleur risque de s’ éteindre avec les nouvelles générations black-blanc-beur. C’ est imminent ! Gageons que dans 100 ans, on n’ en sera encore à faire ce genre d’ espérances.
« Mais je refusai toute tétanisation affective. Je voulais être un homme, rien qu’un homme. D’aucuns me reliaient aux ancêtres miens, esclavagisés, lynchés : je décidai d’assumer. C’est à travers le plan universel de l’intellect que je comprenais cette parenté interne, - j’étais petit-fils d’esclaves au même titre que le président Lebrun l’était de paysans corvéables et taillables. Au fond, l’alerte se dissipait assez rapidement »
Frantz Fanon
Dans le désert du préjugé de couleur, où les seuls oasis auxquels le Noir puisse s’ abreuver ont pour nom « honte de soi », vint la négritude. En lisant Senghor, Fanon se questionne :
« Avais-je bien lu ? Je relus à coups redoublés. De l’ autre côté du monde blanc, une féerique culture nègre me saluait. Sculpture nègre ! Je commençai à rougir d’ orgueil. Était-ce le salut ? » (67)
[…]
« Je fouillai vertigineusement l’ antiquité noire. Ce que j’ y découvris me laissa pantelant. Dans son livre sur L’ abolition de l’ esclavage, Schœlcher nous apportait des arguments péremptoires. Depuis lors, Frobenius, Westermann, Delafosse, tous blancs, firent chorus : Ségou, Djenné, villes de plus de cent milles habitants. On parla de docteurs noirs ( docteurs en théologie qui allaient à la Mecque discuter du coran ). Tout cela exhumé, étalé, viscères au vent, me permit de retrouver une catégorie historique valable. Le Blanc s’ était trompé, je n’ étais pas un primitif, pas d’ avantage un demi-homme (…) » (68)
Et là, patatras ! Arrive Jean-Paul Sartre qui affirme que la négritude est un concept intérimaire et transitoire voué à porter la parole de dignité des Noirs avant de disparaître de lui-même. Fanon, lisant cette phrase, sentit « qu’ on [lui] volait [sa] dernière chance » puis assura à ses amis que « la génération des poètes noirs vient de recevoir un coup qui ne pardonne pas ». Pis, la trahison venait d’ un ami des peuples opprimés « qui n’ a rien trouvé de mieux que de montrer la relativité » de la négritude : « Comment ? J’ ai à peine ouvert les yeux qu’ on avait bâillonnés, et déjà l’ on veut me noyer dans l’ universel ? Et les autres ? (…) » (69)
Pourtant, poursuit-il, au sujet de Sartre « pour une fois, cet hégélien-né avait oublié que la conscience a besoin de se perdre dans la nuit de l’ absolu, seule condition pour parvenir à la conscience de soi » (70)…
Il fait appel à Aimé Césaire ( Ma négritude n’est ni une tour, ni une cathédrale etc. ) pour répondre à cet impudent qui, « au moment où [ il ] tente une saisie de [son] être, [lui] enlève toute illusion » (71)
« En termes de conscience, la conscience noire se donne comme densité absolue, comme pleine d’elle-même, étape pré-existante à toute fente, à toute abolition de soi par le désir. Jean-Paul Sartre par cette étude a détruit l’enthousiasme noir. Contre le devenir historique, il y avait à opposer l’imprésivibilité. J’avais besoin de me perdre dans la négritude absolument. Peut-être qu’un jour, au sein de ce romantisme malheureux … »
Frantz Fanon
C’ est parce que le monde blanc a rejeté sa rationalisation qu’ il décida de s’ identifier à l’ irrationalité. Cette irrationalité n’ est autre que la négritude, ce « romantisme malheureux ». Et l’ on comprend que Fanon la voit comme une simple roue de secours à laquelle les Noirs s’ accrochent, parce que rejetés de toute part : « j’ avais, pour le besoin de la cause, adopté le processus régressif, mais il restait que c’ était une arme étrangère ; ici je suis chez moi ; je suis bâti d’ irrationnel ; je patauge dans l’ irrationnel. Irrationnel jusqu’ au cou. Et maintenant, vibre ma voix » (72)
Le Noir vise à l’ universel. Ainsi le clamait Césaire, « dont nous voudrions que beaucoup d’ intellectuels noirs s’ en inspirent, affirme t-il ». Seulement, sa couleur de peau le rattrape. Un jour, « ce nègre dit : " Ma négritude n’est ni une tour…". Et l’ on est venu l’ helléniser, l’ orphéiser…ce nègre qui recherche l’ universel. Il recherche l’ universel ! Mais en juin 1950, les hôtels parisiens refusaient de loger des pèlerins noirs. Pourquoi ? Tout simplement parce que les clients anglo-saxons ( qui sont riches et négrophobes comme chacun sait ) risquaient de déménager » (73)
Mais Césaire n’ a pas été compris. On attendait d’ un Noir - et on attend encore aujourd’ hui - qu’ il se contente de répondre à l’ injonction mimétique. Qu’ il ne pense rien. Il doit vivre la réussite sociale pour lui, en rejoignant l’ élite qui l’ a consacré et s’ empresser d’ oublier d’ où il vient au nom du refus de s’ enfermer dans le communautarisme !
Au lieu de cela, Fanon comprend que « Césaire est descendu. Il a accepté de voir ce qui se passait tout au fond, et maintenant il peut monter. Il est mûr pour l’ aube. Mais il ne laisse pas le Noir en bas. Il le prend sur ses épaules et le hisse aux nues. Déjà dans Cahier d’un retour au pays natal, il nous avait prévenus. C’ est le psychisme ascensionnel (…) » (74)
Mais ce refus de l’ égoïsme du bien-être et du culte du « tout pour m
Publié le 24/06/2007 à 12:00 par feobus
Lettre ouverte de Claude Ribbe à Aimé Césaire, écrivain, normalien « noir » promotion 1935, Lettres.
Cher Aimé Césaire et cher Archicube,
Vous savez l’admiration et l’affection que j’ai pour vous. Pas l’admiration convenue des imbéciles qui viennent vous voir en procession sans avoir lu une seule ligne du Discours sur le colonialisme et qui croient qu’il suffit de serrer la main à un homme de talent pour en voler un peu. Vous le savez bien, le talent n’est pas contagieux, hélas. Voici un an, l’un de nos amis communs vous remit mon ouvrage, Le Crime de Napoléon, qui me valut insultes et menaces de mort en métropole, mais aussi beaucoup de lecteurs et votre estime, je crois. Car après avoir lu ce livre, vous me fîtes porter une invitation dans le cadre du Festival de Fort-de-France pour que nous nous rencontrions enfin. C’est ainsi que nous avons passé une matinée ensemble au mois de juillet dernier en compagnie de notre regretté Camille Darsières.
J’apprends aujourd’hui que vous avez rejoint un comité de soutien à Ségolène Royal. C’est votre droit le plus absolu. Pour être tout à fait honnête, je vous dirai que j’ai été bien étonné que Ségolène Royal puisse aller au Sénégal (où elle est née) sans un passage à Gorée pour rendre hommage aux esclaves, nos ancêtres ; bien étonné, dimanche dernier, de lire dans Le Parisien qu’une brave « nounou antillaise » répondant au nom d’Aurele, avait élevé ses quatre enfants ; bien étonné d’apprendre qu’avant la visite dont elle pense vous honorer demain, des fillettes de son ancienne école très catholique chanteront - un peu comme au bon vieux temps de Pétain- trois chansons à sa gloire, trois comptines qu’elles auraient été forcés d’ânonner depuis une semaine, malgré l’opposition de certains parents.
La photographie publiée voici quelques mois dans Le Monde qui représentait une petite fille bien sage dans le jardin tropical de son papa officier m’a également laissé rêveur, surtout quand on sait que ce colonel de la «coloniale», n’était - de toute évidence - ni un lecteur du Discours sur le colonialisme ni un habitué de la mairie de Fort-de-France, dont vous étiez le maire. Mais peu m’importe que dans certaines familles il y ait plus d’adhérents du FN ou du MPF que dans la vôtre ou la mienne.
Toutes ces impressions désagréables ne préjugent en rien des intentions d’une femme qui n’est pas responsable des siens. Après tout, d’où qu’elle vienne, elle traite sûrement son personnel de maison avec humanité. Elle fera peut-être de bonnes choses pour l’Outre-mer en général et la Martinique en particulier. Et pourquoi pas l’indépendance que vous souhaitez, puisque le Québec y a aurait droit ?
Vous devez savoir que Ségolène Royal est la candidate du parti socialiste et qu’au parti socialiste figure un grossier personnage du nom de Georges Frêche. Cet homme est raciste et tout le monde le sait. Il n’aime ni les femmes ni les hommes nègres. Pas plus les joueurs de football que les normaliens.
Pour lui, ce ne sont pas des Français. J’ai appris récemment d’un des émules de Georges Frêche, Alain Finkielkraut, que j’étais un « normalien » noir. Noir, si je veux et quand je veux. C’est moi qui décide. Normalien, parce que j’ai réussi en 1974 à être sans doute l’un des premier Guadeloupéens (ou le premier, je ne sais trop) à franchir la porte étroite de la rue d’Ulm, 180 ans après sa création, l’année de l’abolition de l’esclavage.
Ce n’était pas le fruit d’une discrimination positive, mais la sélection d’un concours. Tout comme vous, en 1935, vous fûtes le premier Martiniquais à entrer dans cette prestigieuse école de la République qui faisait rêver Mitterrand et qui abrita aussi nos camarades Herr, Jaurés, Blum et Pompidou. On ne nous a pas fait de cadeau. Cela me donne juste le droit de vous appeler « cher archicube » et vous « cher camarade ». Alors normaliens, oui. Nègres, si nous l’avons choisi, mais pas normaliens « noirs ». Frêche, Finkielkraut et Sevran sont trois racistes. Mais racistes tout court, pas racistes blancs. Donc vous soutenez la fille du «colon». Très bien. Le problème, c’est que le négrophobe de Montpellier la soutient aussi, un peu comme la corde soutient le pendu. Et il s’en vante. Il fanfaronne même à la tête d’un comité. Ségolène Royal n’a jamais désavoué ce soutien. Donc vous voilà en fâcheuse compagnie puisque Frêche est votre compagnon.
Lorsqu’on s’est aperçu que la date fatidique du voyage aux Antilles approchait, on a conseillé à ce Frêche de se mettre en congé du parti socialiste - juste pour la forme, le temps de la campagne - sans renoncer, bien entendu, à la présidence du comité de soutien à sa candidate. Ségolène Royal a approuvé cette décision « Ce qu’il a fait est très bien. On peut en rester là ».
Eh bien non, justement ! On n’en restera pas là ! Les Antillais ont commencé à se mobiliser. Des élus ont demandé, à cor et à cri, que Royal prenne position pour l’exclusion de Frêche, ce qu’elle a fait quatre jours plus tard, disant exactement le contraire de ce qu’elle venait de dire. Mais Frêche n’est pas encore exclu. Tant qu’il reste membre du parti socialiste et président d’un comité de soutien à Ségolène Royal, il me paraît difficile que vous la receviez.
Mon opinion est que vous pourriez reporter d’une journée l’audience que vous vous proposez de lui accorder, donc attendre l’exclusion de Georges Frêche, samedi 27 janvier, ainsi que son départ du comité de soutien. Une journée ! Vingt-quatre heures ! Ce n’est pas grand-chose pour l’honneur des Nègres et votre honneur à vous, pour l’honneur de la Martinique, pour l’honneur de l’Outre-mer, pour l’honneur des socialistes et pour l’honneur de la France.
Mais c’est beaucoup pour nous qui seront massés dans le froid, rue de Solférino, à dix heures du matin, ce même 27 janvier et qui penserons à vous. Nous qui battrons le pavé pour soutenir les socialistes antiracistes contre un socialiste raciste qui fait le fier-à-bras. Nous qui attendrons que la commission des conflits du parti rende enfin justice et condamne l’appel à la discrimination raciale publiquement lancé par Georges Frêche le 17 novembre 2006. Nous avons besoin de votre soutien, plus encore que Ségolène Royal. Voici, cher Aimé Césaire, ce que j’avais à vous demander aujourd’hui. Vous ferez ce que vous voudrez. J’espère que nous nous reverrons bientôt.Recevez, cher Archicube, l’expression de mes pensées amicales et respectueuses.
Claude Ribbe
écrivain, normalien « noir »,
promotion 1974, Lettres.
Publié le 23/06/2007 à 12:00 par feobus
Mon île
lambeau de terre couché sur la vague
dans le petit matin
brille
comme la carapace d'un crabe
après la pluie
mais dans son dénuement maritime
à l'instar d'un crabe
elle se meurt
prisonnière d'une attrape